Khosrou Parviz

Ce qui arriva entre Bahram Djoubineh et le Khakan de la Chine

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Maintenant, conte de longues histoires,conte ce qui arriva à Bahram Djoubineh lorsqu’il eut atteint le pays des Turcs et rencontré leurs chefs et leurs grands.

Dix mille héros au cœur éveillé, des cavaliers d’élite, allèrent à sa rencontre ; à leur tête, le fils et le frère du Khakan.chacun d’eux accompagné d’un Mobed, son conseiller.

Arrivé près du trône du KhaIran, Bahram descendit de cheval, salua le prince et le bénit.

Quand le Khakan le vit, il se leva, l’embrassa et lui caressa le visage avec la main ; il lui fit bien des questions sur les fatigues de la route, sur ses chagrins et sur la lutte contre le roi et son armée ; puis il adressa les questions d’usage à Ized Guschasp, à Yelan Sineh et aux héros pleins du désir de la vengeance.

Bahram s’assit sur un trône d’argent, prit amicalement dans sa main la main du Khakan et lui dit :

Ô glorieux prince, Sipehdar et chef de l’armée des Turcs et de la Chine !

Tu sais que personne ne peut dans son âme se sentir en sécurité du roi du monde.

Si l’on. veut se reposer de ses fatigues, il vous fait éprouver du dommage ; si l’on vit tranquil-.

lement, il redouble vos peines.

Si tu veux me recevoir ici, si tu veux être mon soutien dans le bonheur et le malheur, je serai ton ami dans ce noble pays, je serai ton lieutenant en toute circonstance ; mais si je te cause des embarras, je partirai et me mettrai à errer sur la terre entière et si c’est ton avis, j’irai d’ici en l’Inde. »

Le Khakan répondit :

Ô toi qui portes haut la tête, puisses-tu ne jamais avoir besoin de faire cela.

Je te traiterai pomme un allié, que dis-je, comme un allié ?

Je te mettrai au-dessus de mes fils ; tout mon pays m’aidera en cela, tous mes sujets et tous mes grands.

Je te placerai au-dessus des chefs des Turcs, jeté rendrai indépendant de tous mes grands. »

Bahram exigea une promesse par serment ; jusque-là c’étaient des paroles et il demanda que le ’Khakan y engageât son âme.

Le Khakan dit :

Par le grand Dieu qui est mon guide et le tien, je jure de rester ton ami sincère ; dans le bonheur et dans le malheur je. partagerai ton sort. »

Ensuite on prépara deux palais pour ces hâtes, on fit porter toutes sortes d’étoiles, le Khakan envoya des serviteurs, des vêtements, des vivres, ce qu’il fallait de tapis, la vaiselle d’or et d’argent dont on avait besoin, des brocarts et des joyaux dignes d’un roi et l’âme sombre de Bahram retrouva, tout son éclat.

Jamais le Kliakan de la Chine ne se rendait au jeu de la balle, à une assemblée ou à la chasse, sans : 7 n que Bahram l’accompagnât et c’est ainsi qu’il continua à vivre, ne cessant de bénir Bahram et de lui prodiguer des louanges.

Or, un des grands, ami du Khakan, son assistant dans les combats, un homme de plus haute naissance que le prince, du nom de Mekatoureh, à qui le Khakan devait sa gloire et ses succès, venait tous les matins chez celui-ci et baisait ses propres doigts devant l’illustre maître de la Chine, comme le font des sujets quand ils viennent saluer le roi.

Chaque fois il emportait du trésor du prince, qui connaissait le monde, mille pièces d’or.

Pendant quelque temps Bahram observait cela, il observait avec étonnement le Khakan et un jour il lui dit en souriant :

Ô homme puissant, toi qui es respecté parmi tous les princes du monde !

Chaque matin, à l’heure de l’audience, ce Turc reçoit mille pièces d’or.

Que ce soit un cadeau, que ce soit sa paye, faut-il donc que sa part soit tout l’or d’une mine ? »

Le Khakan dit :

J’ai pour coutume et ma religion m’oblige à cela, de ne pas refuser quand un homme qui se distingue par sa bravoure et dans les moments de danger par sa ténacité, me demande une paye plus haute.

Cet homme est avide et besogneux ; mais il est maintenant plus puissant que moi et l’or est le charme par lequel j’agis sur lui ; si je le néglige, mon armée bouillonnera de colère et mes propres troupes rendront sombre

pour moi le jour brillant. »

L’ambitieux Bahram dit :

Ô chef du peuple, tu as fait ton maître de Mekatoureh ; mais quand le maître du monde est vaillant et a. l’esprit éveillé, il ne faut pas livrer le pouvoir à un inférieur.

Te serait-il agréable si je te débarrassais, ou as-tu réellement besoin de son affection ? »

Le Khakan lui dit :

Tu as ma permission pour ce que tu voudras faire, agis selon ta prudence et dans ta mesure ; si tu peux m’en délivrer, tu auras mis fin à toutes les disputes. »

Bahram lui dit :

Eh bien, demain matin, quand Mekatoureh viendra demander ses dinars, ne lui souris pas, ne le regarde pas, ne lui derme pas de réponse, ou, si tu lui réponds, parle-lui avec colère. »

Cette nuit se passa, et, à l’aube du jour, Mettatoureh arriva et réclama les pièces d’or.

Le Khakan. maître du monde, ne le regarda pas, il n’écouta pas ce que disait ce Turc avide de combats.

Mekatoureh se mit en colère contre le Khakan, il s’emporla tout à fait et ouvrit grandement ses yeux ; il dit au Khakan :

Ô homme illustre !

Pourquoi me traites-tu aujourd’hui avec mépris ?

Peut-être que ce prince perse, qui est arrivé dans ce pays avec trente compagnons, travaille à te détourner de la justice et veut ruiner ton armée. »

Bahram lui dit :

n Ô homme avide de luttes, pourquoi parles-tu si âprement ?

Si le Khakan suit mes avis, si son esprit ne se re--fuse pas à mes conseils, je ne permettrai pas que tu viennes tous les matins dépouiller tranquillement son trésor.

Admettons que tu vailles trois cents cavaliers et que dans le combat tu choisisses le lion pour ta proie, cela ne justifie pas que tu demaudes au roi tous les matins, à l’aube du jour, des pièces d’or par charges d’âne. »

Mekatoureh écouta ces paroles, sa tête se remplit de haine à cause de cet outrage, il étendit la main en colère et avec emportement, tira de son carquois une flèche de bois de peuplier et dit à Bahram :

.Voici mon enseigne, voici mon interprète dans la bataille.

Si tu te présentes demain à cette cour. prends garde à la pointe de mes flèches. »

Bahram, aces paroles, devint ardent pour la lutte, s’avança, une épée indienne en main et la lui donna, disant :

Ceci est un souvenir de moi, prendsla et vois si elle te servira. »

Mekatoureh quitta le Khakan et se rendit en toute hâte à ses tentes.

Dernière mise à jour : 7 sept. 2021