Bahram Gour

Commencement du récit

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Lorsque Bahram Gour s’assit sur son trône, le soleil rendit hommage à sa royauté.

Le roi se mit à adorer le Créateur, le maître du monde, qui ne se repose jamais, qui voit tout ; le maître de la victoire et du pouvoir, maître de toute augmentation et de toute diminution, maître de la justice et maître de l’intelligence;le maître qui nourrit tout, le guide de tous.

Puis, il dit :

Je dois ce trône et cette couronne à celui qui a créé la fortune ; j’espère en lui et je le crains, je lui rends grâce de ses bienfaits.

Vous aussi, glorifiez-le ; faites des efforts pour observer le pacte qui nous lie à lui.

Les Iraniens ouvrirent leurs lèvres, disant :

Nous nous sommes ceints pour ton service, puisse cette couronne porter bonheur au roi !

Puisse son cœur et sa fortune vivre éternellement !

Après lui avoir rendu hommage, ils versèrent tous devant lui des pierreries.

Bahram reprit :

Ô vous qui portez haut la tête, qui avez éprouvé le bonheur et le malheur des jours !

Nous tous sommes des serviteurs et Dieu est un ; à lui seul doit s’adresser l’adoration.

Je vous préserverai de la crainte de mauvais jours et ne vous exposerai jamais à un sort ennemi.

Il parla ainsi et les Iraniens se levèrent et appelèrent de nouveau des bénédictions sur lui ; ils passèrent la nuit sombre à parler de ces événements et lorsque le soleil montra sa face dans le ciel, le roi s’assit tranquillement sur son trône et les Iraniens revinrent demandant audience.

Bahram dit aux grands :

Ô hommes illustres et à l’étoile fortunée !

Tournons-nous vers Dieu et réjouissons-nous en lui, ne soyons pas glorieux et arrachons de nos cœurs les vanités du monde.

Ensuite on fit venir les chevaux et les héros lui formèrent une cour digne d’un Keïanide.

Le troisième jour, il s’assit sur le trône et dit :

Il ne faut pas négliger les coutumes de l’adoration ; affirmons l’existence de Dieu, rendons notre âme familière avec la foi.

Il y a un paradis, un enfer et une résurrection et nous ne pouvons échapper au bien et au mal ; celui qui ne croit pas à un jour de rétribution, ne le tiens pas pour un croyant ni pour un sage.

Le quatrième jour, lorsque, assis sur le trône d’ivoire, il mit sur sa tête cette couronne vénérée, il dit :

Je ne me suis jamais attaché aux trésors, mais je me suis attaché aux hommes ; je ne tiens pas à cette demeure passagère et je pense sans terreur et sans peine que je dois la quitter.

Car l’autre monde est éternel et celui-ci n’est qu’un passage ; abstiens-toi donc de l’avidité et ne te fais pas de soucis.

Le cinquième jour, il dit :

La peine que j’imposerais à d’autres pour m’agrandir m’ôterait mon plaisir.

Faisons des efforts pour obtenir le gai paradis ; heureux quiconque n’a répandu que la semence du bien !

Le sixième jour, il dit à ses sujets :

À Dieu ne plaise que nous n’essuyions jamais une défaite.

Nous garantirons l’armée contre l’ennemi, nous la rendrons formidable aux malveillants.

Le septième jour, il prit sa place et dit :

Ô grands pleins d’intelligence, vigilants et expérimentés !

Puisque le contact avec des hommes vils nous avilit, associons-nous avec les sages.

Quiconque ne m’aide pas chaudement aura plus à souffrir sous moi que sous mon père ; mais quiconque obéit à mes ordres n’éprouvera ni soucis, ni chagrins, ni peines.

Le huitième jour, étant monté sur le trône, il fit appeler Djouanouï parmi ceux qui se trouvaient à la cour et lui dit :

Écris une lettre bienveillante et pleine de justice à tous les grands, à tous les hommes illustres, à toutes les provinces, disant :

Bahram est monté joyeusement sur le trône ; il est le maître de la générosité et de la droiture, il se tient loin de toute perversité ; il est glorieux et puissant, bienveillant et juste ; il ne parle que de Dieu, le juste, le saint.

Je favoriserai, dit-il, ceux qui m’obéiront, mais ce serait préparer la commission des fautes, si on enlevait le remède (la : punition).

Je me suis assis sur le trône de mon glorieux père en observant les coutumes de Thahmouras, le juste.

J’userai de droiture envers tous, même envers les plus pervers.

Je surpasserai en justice mes ancêtres, je serai votre guide dans la foi.

Je suis la religion de Zerdouscht, le prophète, je ne m’écarterai pas de la route de mes ancêtres ; ayons devant nos yeux la loi antique de Zerdouscht, suivons la voie du prophète véridique.

Chacun de vous est roi dans sa propriété, défenseur de ses limites, gardien de sa foi et maître de sa femme et de ses enfants.

Heureux l’homme intelligent et pur !

Je ne veux pas accumuler de l’or dans mon trésor, car les trésors laissent dans la peine le pauvre, si Dieu me donne vie et me préserve de l’influence des astres hostiles.

Lisez cette lettre joyeuse, qui vous assure à jamais la préservation de votre honneur et de vos biens.

Nos salutations à tous les rois, surtout à ceux dont la bienveillance forme la trame et la chaîne.

On posa le sceau sur les lettres ; Bahram choisit des messagers illustres et des Mobeds, des cavaliers à l’esprit éveillé et prudent, partirent avec les lettres.

Dernière mise à jour : 7 sept. 2021