Bahram Gour

Bahram épouse la fille du joaillier

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Bahram se rendit le huitième jour surle lieu de la chasse, accompagné de Rouzbeh et d’une escorte de ; mille cavaliers ; il vit toute la plaine remplie d’onagres, lira de l’étui son arc de Keïanide, attacha la corde aux deux bouts noirs et invoqua Dieu, le victorieux. ’était le printemps, les onagres mâles cherchaient des femelles ; ils s’étaient réunis du monde entier en ce lieu et se déchiraient la peau l’un à l’autre, de façon que leur sang avait donné à la terre la couleur des tulipes.

Le roi marcha jusqu’à ce qu’il vît un onagre mâle en chaleur en combattre un autre ; le vaillant onagre victorieux s’accoupla avec une femelle.

Bahram banda son arc ; il sourit en voyantles onagres et fut tout joyeux.

Il frappa de sa flèche le dos du male et la flèche pénétra dans l’animal de la pointe jusqu’aux plumes et cousit ensemble le mâle etlla femelle.

Toute l’escorte était émerveillée de ce coup et tous ceux qui en avaient été témoins se mirent à répandre des bénédictions sur le roi, disant :

Puisse le mauvais œil rester loin de ta gloire !

Puisse chaque jour être une fête pour toi !

Ta valeur est unique dans le monde, car tu es un roi, un (Ihosroës et un héros. »

De là il lança son cheval Schebreng et trouva sur son chemin un bois devant lequel il aperçut (Jeux lions féroces.

Il banda son arc et le tendit ; le coup frappa la poitrine du lion mâle, la flèche traversa son corps, depuis la pointe jusqu’aux plumes et s’enfonce dans la terre.

Il s’approcha alors rapidement de la femelle, lâcha l’anneau du pouce qui retenait la flèche et cousit ensemble la poitrine et l’aine de l’animal. il dit :

"était pourtant une flèche sans plumes et elle n’était pas aiguë, sa pointe était émoussée. »

Toute son escorte chanta sa gloire, disant :

Ô illustre roi de la terre !

Personne n’a vu ni ne verra un maître comme toi sur le trône impérial.

Puisque tu abats un lion avec une flèche sans plumes, tu pourrais arracher de sa base un rocher. »

Bahram courut sur cette prairie avec tous ses amis qui lui faisaient escorte ; ils virent un bois plein de moutons et des pâtres qui s’enfuyaient de

À ces crainte d’un malheur.

Un chef des pâtres aperçut le roi ; il n’avait jamais de repos de peur des bêtes féroces.

Bahram lui dit :

Qui tient donc des moutons dans un lieu si peu favorable ? »

Le pâtre répondit :

Ô homme illustre !

Moi seul dans le monde ose venir sur cette prairie.

Ces moutons appartiennent à un marchand de pierreries ; je les ai amenés hier de la montagne dans la plaine.

Le possesseur de ces moutons est riche et ne recule pas devant le danger d’une perte ; il a des pierres fines par charges d’âne, de même de l’or, de l’argent et des joyaux.

Il n’a qu’une fille, qui joue du luth et a une tête frisée dont les boucles tombent l’une sur l’autre.

Le père ne prend du vin que de sa main ; personne n’a jamais vu un vieillard comme lui.

Comment aurait-il pu garder ces richesses, si -Bahram n’était pas un roi juste ?

Mais le roi des rois du monde n’est pas avide d’or et son Mobed n’est pas un homme injuste. »

Ensuite le chef des pâtres dit :

Ô homme illustre, brave, intelligent et vaillant cavalier !

Ne peux-tu pas me dire qui a tué ces bêtes féroces ?

Que le maître du monde soit le soutien de cet hommel»

Bahram répondit :

Ces deux lions ont succombé aux flèches d’un vaillant homme ; il les a tués, puis ce cavalier qui portait haut la tête est parti avec ses sept compagnons.

Où est la maison du marchand de pierreries ?

Indique-moi le ellev min et ne me le Cache pas. »

Le chef des pâtres lui dite Continue ta route et tu trouveras un beau et frais village.

La réputation de cet endroit doit avoir pénétré jusqu’à la ville et jusqu’au palais du roi.

Lorsque le ciel revêt son vêtement de satin noir, ce richard se met en fête et si tu veux attendre un peu, tu Entendras un bruit de coupes et des sans de luths»

Bahram, sur ces. paroles, demanda un cheval de main et un vêtement digne d’un roi et quitta son Destour et l’escorte ; sa tête était évidemment remplie de désirs.

Bouzbeh dit aux grands :

Le roi del’Iran va aller dans ce village, frappera à la porte du marchand de pierreries et écoutez bien ce que je vais vous dire : il demandera cette jeune fille à son père et placera sans aucun doute une couronne d’or sur sa tête.

Il l’amènera de la dans la chambre à cou-I cher dorée et renverra les autres dans l’appartement des femmes de Berzin.

Il n’est jamais las des femmes et dans la nuit sombre elles s’enfuient de lui.

Il a maintenant. plus de cent appartements de femmes et c’est un malheur qu’un roi des rois se conduise ainsi.

L’eunuque a compté dans le palais du roi neuf cent trente jeunes filles, ayant toutes sur la tête de lourds diadèmes et qui toutes ont reçu de grandes richesses.

Il demande des impôts de tous les’pays et dans un seul mois il dissipe le tribut fourni par le Roum.

Hélas !

Cette poitrine,

ces épaules et cette taille !

Hélas !

Ce visage qui fait la joie de l’assemblée !

Personne ne verra plus’un homme de cette stature et de cette force, un homme qui peut avec une flèche coudre ensemble deux onagres.

Il périra par l’abus des femmes et sera bientôt mon comme un homme mal portant ; x ses yeux se terniront, ses joues pâliront, son corps deviendra faible et son visage noircira.

Le parfum des femmes blanchit ses cheveux et quand on a des cheveux blancs on perd tout espoir dans le monde ; sa taille droite se courbera pendant qu’il sera encore jeune et tout ce malheur viendra des femmes.

Il ne faut cohabiter qu’une fois par mois, plus fréquemment est verser son propre sang ; de même il faut qu’un homme jeune et prudent ménage ses forces à cause de ses enfants ; car si l’on dépasse cette mesure, on s’épuise et un homme faible produit des hommes dont le corps manque de sang. »

En parlant ainsi ils arrivèrent au palais du roi au moment où le soleil disparaissait de la voûte du ciel.

Bahram partit lorsque la nuit fut devenue sombre, accompagné d’un seul homme pour son cheval ; il alla jusqu’à, la maison du marchand de pierreries et lorsque les sons du luth frappèrent son oreille, il lança à l’instant son cheval Gulgoun dans la direction du son, vers la maison du marchand.

Il frappa à la porte avec l’anneau et demanda à entrer en invoquant l’aide du Maître du soleil.

Une servante bienveillante demanda ce qu’il y avait et pourquoi dans la nuit noire on frappait à la porte.

Il répondit :

(je malin le roi est allé dans la plaine pour chasser ; mon cheval est devenu boiteux sans moi et je suis resté tout à coup en arrière ; on me volerait dans la rue ce beau cheval et sa bride d’or et ne saurais que faire. »

La jeune fille alla auprès du Dihkan et lui dit :

Un homme nous prie de l’abriter ; il dit qu’on volera ici son cheval et sa bride d’or et qu’il en sera malheureux.

Le Dihknn répondit :

Ouvre la porte ; est-ce que tu n’as jamais vu des hôtes ici ? »

La jeune fille courut ouvrir la porte et dit à Bahram :

Entre, jeune homme. »

Quand le roi fut entré et qu’il vit un si beau lieu et partout des serviteurs debout, il dit en lui-même :

Ô Dieu unique, distributeur de la justice !

Tu es le guide de les serviteurs vers la justice.

Puisse-je ne jamais m’en écarter !

Puissent l’avidité et l’orgueil n’être jamais ma loi !

Puissent toutes mes actions être selon la justice !

Puisse le cœur de mes sujets être heureux par moi !

Plus ma sagesse et ma justice seront grandes, plus mon nom brillera après me mort et tous mes sujets jouiront, comme ce marchand de pierreries, des sons du luth et des coupes de vin.

Le roi des rois arriva au principal pavillon ; il

Aperçut de la porte la fille célèbre du Dihkan et celui-ci, le voyant, se leva avec empressement et inclina sa taille droite, disant :

Que cette nuit te soit propice !

Que le cœur de tes ennemis soit déchiré ! »

Le maître de la maison fit étendre un tapis et placer un coussin et se réjouit de la bonne mine de Bahram.

On apporta vite une table somptueuse sur laquelle on posa les mets qui étaient prêts.

Un serviteur entra, le maître lui ordonna d’attacher le cheval et l’on prépara pour le domestique de Bahram aussi une table et l’on arrangea pour lui une autre chambre.

On plaça une chaise pour le maître de la maison et il s’assit près du roi ; il se mit à s’excuser et dit à Bahram :

Ô seigneur bienveillant !

Tu es le maître dans ma maison : conforme-toi à nos manières grossières.

Quand le dîner est terminé, il faut saisir les coupes, puis chercher du repos dans le doux sommeil ; la nuit est noire et le vin digne d’un roi ; tu dormiras quand tu seras ivre et demain matin tu le réveilleras de ton sommeil et devras te hâter de te rendre au lever du r0i. »Bahram répondit :

.

Qui est-ce qui trouve dans une nuit noire un hôte frais de visage comme toi ?

Mais il ne faut pas oublier de rendre grâces à Dieu, car le cœur des ingrats se remplit de terreurs. »

A La jeune fille apporta de l’eau et le vase’pour les mains et lut confuse à l’aspect de l’étranger.

Quand Ù les mains furent lavées, le Dikhan demanda une coupe de vin, il demanda de la musique, du bien-être et du repos.

La jeune fille apporta une coupe de vin : le vin était rouge et la coupe couronnée de roses et de fenugrec.

Le Dihkan saisit le premier la coupe, la vida et la lava avec du musc et de l’eau de rose ; puis il donna à Bahram cette coupe qui charmait le cœur et lui demanda :

Quel est le nom de mon convive ?

Car je vais faire avec toi sous serment un traité d’amitié et prendre pour garant le roi Bahram. »

Le roi rit beaucoup de ces paroles et dit :

Je m’appelle Guschasp, le cavalier.

Je suis venu ici attiré par le son du luth et non pas pour boire et pour demeurer. »

Le maître de la maison dit :

Ma fille, que voici, élève ma tête jusqu’au ciel ; elle est mon échanson et ma joueuse de luth, ma chanteuse et ma consolatrice.

Ce charme du cœur s’appelle Arzou ; elle me verse du vin et charme mon cœur. »

Il dit à.ce cyprès élancé :

Prends ton luth et viens auprès de Guschasp dans toute ta beauté.nLa joueuse de luth alla vers le roi, marchant majestueusement comme le Canope du Yémen et dit à Bahram :

Ô cavalier d’élite, qui ressembles en toute chose au roi !

Sache que cette maison en fête est à toi.

Mon père est ton hôte et ton trésorier.

Que les nuits noires te soient beureuses !

Que ta tête s’élève plus haut que les nuages qui a font : tomber la pluie !

N Bahram lui dit :

AssiedS-toi Il v’t

et prends ton luth, il me faut sans délai une chanson ; ton père Mahiar se rajeunira cette nuit, il donnera à son hôte son âme pour gage. »

I La jeune fille appuya le luth contre sa poitrine et commença par le chant des mages et lorsque les cordes de soie résonnèrent, toute la maison fut remplie d’un parfum de jasmin.

Ensuite elle chanta en honneur de son père Mahiar :

Tu comme un V cyprès élancé au bord du ruisseau, tes cheveux sont comme du camphre autour d’une rose, ta parole est pleine de chaleur, ton cœur plein de tendresse ; puissent tes ennemis être toujours affligés !

Puisse la sagesse toujours grandir ton âme !

Tu es comme Feridoun au noble caractère et je suis ta servante ; mon nom est Arzou.

Tu es aussi heureux de voir ton hôte que le roi de voir son armée victorieuse dans la bataille. »

Ensuite elle passa auprès de l’hôte en faisant vibrer son luth et en chantant :

Ô toi qui as une mine de roi, dont l’étoile est puissante, dont le cœur est sincère, dont la main est prompte dans le combat !

Quiconque n’a pas vu Bahram, le cavalier célébré, qui charme les cœurs, qu’il regarde ton visage, car tu ne ressembles qu’à lui dans toute l’armée.

Ta taille est comme le roseau, ta stature est celle du cyprès et ce cyprès marche gracieusement comme un faisan.

Par ton cœur tu es un lion mâle, par ton corps un éléphant terrible ; dans le combat

. 5H tu lances ton javelot à deux milles.

Tes joues ressemblent aux fleurs du grenadier ; on dirait qu’elles sont écloses sur des rosiers et des tulipes.

Tes deux bras sont comme les cuisses du dromadaire ; tu arracherais de sa base le mont Bizoutoun.

Que le corps d’Arzou soit la poussière sous tes pieds, que sa vie entière se passe selon ton gré !

N Ce chant, ce luth, cette mine, cette taille et cette intelligence saisirent tellement le maître du monde, qu’on aurait dit que son cœur était devenu un grenier de tourments.

Mahiar était assis devant lui, ivre et le roi dit au maître de la maison :

Donne-moi ta fille selon les rites de la religion, si tu .veux qu’on te joue pour ta justice. »

Alors Mahiar dit à Arzou :

Veux-tu que cet homme au cœur de lion te fasse des cadeaux ?

Regarde-le, pour voir s’il te convient et s’il te paraît bon de vivre auprès de lui. »

Arzou répondit à Mahiar :

Ô mon père, qui es plein de noblesse et de bonté !

Si tu veux me donner à un homme, Guschasp, le cavalier, est digne de moi, voilà tout.

Qui est-ce qui, voyant un, homme comme lui, ne dirait pas à Bahram : Boule-toi ? »

Mahiar" n’était pas satisfait de la réponse de sa fille ; il dit à Bahram :

Ô vaillant cavalier !

Regardela attentivement de la tête aux pieds ; observe son énergie, son savoir et son intelligence ; vois si ton cœur l’approuvc ; mais il lift.

vaudrait mieux prendre des informations que de rester assis.

Avec toutes ses vertus elle n’est pas pauvre ; je ne suis pas accoutumé à me vanter, mais si tu comptes les joyaux de Mahiar, tu trouveras qu’ils dépassent ce qui setrouve dans les caisses du roi.

Pourtant ne fais pas une étourderie, prends du repos cette nuit, et, s’il le faut, bois encore une coupe de vin.

Les hommes puissants ne font pas de traité quand ils sont ivres, encore moins un homme de ta valeur.

Attends que le ciel ait ramené le soleil et que la tête des grands soit sortie du sommeil ; nous amènerons alors des vieillards sages, au. cœur patient et qui savent lire.

La nuit sombre ne s’accorde pas avec les coutumes ni avec les rites du roi Feridoun.

Demander en mariage ou entamer une affaire nouvelle pendant qu’on est ivre ne porte pas bonheur. »

Bahram lui répondit :

C’est absurde et c’est mal de consulter le sort quand on est dans la route de Dieu.

Il me plaît d’épouser cette nuit la joueuse de luth : ne provoque pas un mauvais, augure sur nous, si tu peux faire autrement. »

Le père dit alors à sa fille :

Ô Arzou !

Choisis-tu cet homme, te’ convient-il pour mari ? »

Elle répondit :

0ui, il m’a convenu dès que mes yeux l’ont aperçu.

Ainsi marie-moi et abandonne le reste à Dieu ; le ciel n’a pas de vengeance à exercer contre Mahiar. »

Le père lui dit :

Tu es maintenant . sa femme ; sache que dorénavant tu es sous sa garde. »

Il la donna à Bahram Gour, qui l’épousa et lorsque le jour eut remplacé la nuit la cérémonie était terminée et un serviteur suspendit le fouet du roi’à la porte de Mahiar.

Arzou se retira dans sa chambre, lorsque le monde entier était encore couché.

Mahiar se rendit dans une autre chambre qu’il arrangea pour Guschasp, le cavalier.

Il dit à un serviteur :

Ferme les portes, fais courir quelqu’un chez les pâtres de mes moutons, car il ne faut pas qu’on apporte demain la table sans qu’il y ait de l’agneau et il faut de l’agneau engraissé et excellent.

Quand Guschasp sera réveillé, apporte-lui de la bière et de la glace ; place dans sa chambre à coucher une coupe pleine de camphre et de l’eau de rose et fais de manière que la chambre soit parfumée.

Quant à moi, je suis, malgré les coupes de vin, aussi frais qu’hier soir, car le vieux marchand de pierrerries ne craint pas le vina»

Ayant dit cela, il s’enveloppa la tête et se livra au repos et au sommeil.

Lorsque le soleil eut montré sa couronne resplendissante et que la terre fut devenue comme de l’ivoire brillant, les écuyers et les porteurs de javelots cherchèrent les traces du roi par l’indice de son fouet ; tout le cortège de Bahram se rassembla devant la porte, comme il aurait fait devant la porte, du roi et tous ceux qui reconnurent le fouet s’approa

A 1 obèrent et le saluèrent.

Quand le gardien de la porte vit cette grande foule d’écuyers et de porteurs de javelots, il entra chez son maître endormi, le réveilla, dissipa les fumées de vin pur qui troublaient son esprit et lui dit :

Lève-toi et remue-toi ; ce n’est pas le temps de dormir et de rester assis, car le roi du monde est ton hôte dans cette pauvre maison, notre demeure. »

Le marchand de pierreries s’émut tout à coup des paroles du gardien de la porte ; il demanda :

Qu’est-ce qui te fait dire cela ?

Où trouves-tu les traces du roi ? »

L’homme ivre écoutait encore celui qui lui parlait et déjà il sautait en bas du lit avec des exclamations et disant en colère au gardien de la porte :

Un vieillard sensé ne doit pas parler ainsi. »

Le serviteur répondit :

Ô homme qui a vu le monde !

Qui est-ce qui t’aurait fait roi de l’Iran ?

Il y a une telle armée devant ta porte que, si tu voulais passer, l’espace serait trop étroit.

Quiconque s’arrête devant la porte se met à adorer ce vieux feutre du rideau de la porte.

Un serviteur est venu à l’heure où la lumière qui éclaire le monde n’avait pas encore paru et a suspendu un fouet tressé d’or et incrusté partout de pierres fines devant notre porte, du côté où est notre passage.

Maintenant fais ce qu’il faut, ne sois pas paresseux et ne te rends plus malade avec du vin. »

Le vieillard, qui alors était tout éveillé et avait écouté chaque parole du gardien de la porte, dit en tremblant :

Comment ai-je pu m’enivrer hier devant le roi des rois et ai-je pu faire servir le vin par ma fille ? »

Il courut à la chambre d’Arzou et lui dit :

Ô lune à l’âme noble !

C’est Bahram, le roi des rois kqui est arrivé hier à la maison du joaillier ; il venait de la plaine où il avait chassé, et, au lieu d’aller au Kohendiz, il s’est détourné de la route.

Maintenant lève-toi, mets ta robe de brocart de Roum, place sur ta tête le diadème que tu avais hier soir et prends parmi mes plus beaux joyaux trois rubis dignes d’un roi pour les lui offrir.

Quand tu verras le roi au visage de soleil, incline-toi profondément, croise tes mains sur la poitrine : ne le regarde pas, mais baisse les yeux ; qu’il soit pour toi âme et corps.

S’il te fait des questions, réponds d’une voix douce, parle-lui avec respect et, V modestie.

Quant à moi, je ne me montrerai que s’il me demande et s’il me laisse me placer parmi ses serviteurs.

Je me suis assis à table avec lui comme son égal !

Oh !

Que plutôt les os dans mon corps eussent été brisés en morceaux !

Et ayant bu j’ai été trop libre avec le roi !

Le vin met à mal les jeunes et les vieux») Là-dessus un esclave accourut et annonça que le roi à ’âme sereine était réveillé.

Bahram, s’étant éveillé en bonne santé, alla dans le jardin où il se lava la tête et le corps ; il se tourna vers le soleil et pria et son cœur était plein d’espoir en Dieu.

Puis, il se rendit dans la salle et demanda 4 à un échanson une coupe de vin ; il apprit que ses gens étaient rassemblés devant la porte et leur ordonna de partir.

Ensuite, il demanda qu’Arzou vînt, car il avait envie de la voir ; elle arriva portant du vin et son offrande, humblement, parée de son diadème et de boucles d’oreilles.

Elles’inclina profondément et baisa la terre ; le roi la regarda en souriant et son cœur fut heureux.

Il lui dit :

Comment t’es-tu conduitel’Tu m’as enivré et puis tu es partie.

Tes chants et ton luth me suffisent ; mais accepter un cadeau d’une femme est bon pour d’autres que moi.

Chante-moi de nouveau ta chanson sur la chasse, les coups de lance et les combats du roi. »

Puis, il dit :

Qu’est devenu le joaillier avec qui je me suis enivré hier soir ? »

Lorsque la fille entendit ces paroles, elle appela son père et resta confondue de la bonté de cœur du roi.

Le père se présenta au roi à la mine de soleil, tenant ses mains croisées sur la FOI ?

Trine et dit :

Ô roi, noble, intelligent, puissant, fort et vaillant Mobed !

Puisse le monde aller toujours selon ton gré !

Puissent toutes les couronnes porter ton nom !

Mais un homme qui, comme moi, a bu du breuvage de la folie ne peut que se taire.

Ma faute est venue de mon ignorance ; je pense que tu dois me croire possédé du Div.

Se peut-il que tu me pardonnes et que tu rendes son brillant à ma lune ?

Je suis devant ta porte un esclave sans intelligence et le roi ne voudra pas me compter parmi les hommes. »

Le roi dit :

Quand on a du sens, on ne rend responsable de rien un homme ivre et quand on a le vin chagrin, on ne devrait jamais voir la couleur et sentir le parfum du vin ; mais je n’ai pas vu en toi, dans ton ivresse, de la mauvaise humeur.

Maintenant écoute.

Arzou et qu’au lieu d’excuses elle nous chante la chanson de la tulipe parmi les jasmins.

Pendant ce temps nous boirons du vin et ne penserons pas aux soucis des jours à venin?) A Le prudent Mahiar baisa la terre, apporta une table et prépara tout.

Cet homme aux intentions pures amena aussi. les grands qui se tenaient à la porte de la maison ; mais Arzou, voyant paraître ces hôtes étrangers, rentra dans sa chambre, le visage froncé et y resta jusqu’à ce que le ciel eût revêtu sa robe noire et que les étoiles eussent paru dans le cercle de la lune.

Lorsqu’ils eurent dîné, Mahiar fit appeler Arzou, la fit asseoir sur un siège orné de figures d’or et pria cette lune de prendre sa lyre pour réciter la chanson que le roi avait demandée le matin.

Elle chanta :

0’ vaillant roi !

Les lions qui entendent ton nom s’enfuient de leurs forêts ; tu es le roi victorieux qui brise les armées et ton visage est comme une tulipe entourée de jasmin.

Aucun roi sur la terre n’égale la stature et la lune dans le ciel n’égale pas ta beauté.

Quand une armée voit ton casque dans le combat et sur ton champ

de bataille, le cœur et la moelle de tous se fendent de terreur et ils ne distinguent plus le haut du bas. »

Lorsqu’ils se furent égayés avec du vin et que, après avoir bu à petits traits, ils furent arrivés à boire par coupes entières, Rouzbeh se présenta devant le roi et on lui choisit une demeure dans le bourg : il avait amené une litière et quarante suivantes, tontes au visage de lune et enlevant les cœurs ; les joues de ces Roumies étaient comme du brocart de Rhum et le pays entier ’fut rafraîchi par leur aspect.

Arzou partit pour l’appartement des femmes du roi, ayant sur la tête un diadème de pierres fines.

Dernière mise à jour : 7 sept. 2021