Yezdegird

Commencement du récit

...

Après la mort de Farrukhzad, Yezdegird devint roi, le vingt-cinquième jour du mois de Sipendarmud (février).

Écoute ces paroles d’un homme éloquent et généreux, qui était fatigué de la révolution des jours :

Hélas !

Que ma mère ne m’a-t-elle pas mis au monde !

Que le ciel sublime n’a-t-il point tourné au-dessus de moi !

Que dire du cercle étroit de la vie tracé entre les deux orbes célestes ?

Ce qu’il y a de mieux, c’est de se taire.

Ni les jours de puissance, ni les jours de détresse ne dureront longtemps pour qui que ce soit.

À la bien considérer, la vie n’est qu’un instant ; puisqu’il en est ainsi, n’entre pas en conflit avec elle ; prépare la table, vide la coupe et ne parle jamais des soucis de ce monde.

Quand même le destin inconstant conduirait ton cheval par la bride (serait à tes ordres comme un palefrenier), finalement ta tête doit reposer sur une brique.

N’attache pas ton cœur à de si minces soucis, n’aie aucune confiance en la sphère sublime et sache que, si le sort s’attaque aux lions et aux éléphants, il le fait parce qu’il connaît son pouvoir.

Tu mourras certainement et le destin ne finira pas : c’est une longue histoire, ne sois pas si confiant.

Tu n’es pas plus puissant que Feridoun, tu n’es pas comparable à Parviz, le maître du trône et du diadème.

Réfléchis, vois comment les sept cieux sublimes ont traité Yezdegird.

Lorsqu’il s’assit joyeux sur le trône des Khosroës et qu’il orna sa tête de la couronne, il dit :

Par les évolutions de la sphère qui tourne, je suis le descendant pur de Nouschirwan.

La royauté m’appartient en ligne directe ; le Soleil, l’Épi et les Poissons me sont favorables.

Je donnerai du pouvoir aux grands et je ne ferai pas de mal aux humbles.

Je ne rechercherai la gloire ni par la science, ni par les combats, ni par les actes de violence ou de bravoure, car les jours de la fortune ne durent pour personne, non plus que les trésors, le diadème royal et le trône.

Ce qu’il faut rechercher c’est, non pas le bonheur, mais une renommée durable ; renonce au bonheur et rehausse ton nom, c’est par là que l’homme acquiert l’immortalité, lorsque son corps gît dans la poussière.

Les grands rendirent hommage à Yezdegird et le proclamèrent roi du monde.

Pendant deux fois huit années la lune et le soleil tournèrent au-dessus de lui et ce roi, gouvernant le monde suivant les coutumes anciennes et la justice, fit le bonheur de l’Iran tout entier.

Dernière mise à jour : 7 sept. 2021