Kesra Nouschirwan

Buzurdjmihr donne des conseils à Nouschirwan

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Un jour le maître du monde s’assit gaiement sur le trône, reçut les grands et les savants et leur parla en souriant et le visage ouvert ; Buzurdjmihr prit sa place devant le trône et prononça sur le roi des bénédictions qui rendirent son cœur comme le gai printemps ; il dit :

Ô maître au frais visage, puisse le détracteur n’avoir jamais rien à dire sur toit 0

bienheureux roi des rois, victorieux, maître du monde, savant et noble !

J’ai écrit en pehlevvi quelques mots dans un livre et sur du papier royal ; j’ai remis l’écrit à ton trésorier, espérant qu’un jour viendrait où le roi le lirait ; mais j’ai vu que cette voûte paresseuse du ciel ne veut pas dévoiler mon secret.

Un homme a beau se lever du trône des festins, exposer sa vie dans les batailles, délivrer la terre de ses ennemis, se garantir contre les dangers que lui préparent les Ahrimans, se rendre maître du monde, s’emparer de toute chose l’une après l’autre, avoir la main puissante pour faire de grandes choses, créer des parterres de fleurs, des jardins, des places publiques et des palais, amasser des trésors, réunir autour de lui ses fils, compter beaucoup de jours heureux, augmenter son armée et ses richesses, avoir un palais et une salle d’au-dience brillants, faire travailler les pauvres pour

. lui, ramasser de tous côtés des couronnes et des trésors, réunir des amas d’or et d’argent, ses années ne dépasseront pas la centaine, il deviendra de la poussière, son travail ne lui portera pas de fruit. il laissera à un ennemi ses trésors, il ne gardera ni fils, ni trône, ni diadème, ni salle d’audience royale, ni trésors, ni armée.

Quand ce vent de sa prospérité sera tombé, on l’oubliera et quand la destinée aura passé sur son œuvre, il ne lui survivra qu’une bonne renommée.

Il y a dans le monde deux choses qui ne meurent pas, voilà tout et rien d’autre, quoi que ce soit, ne reste à personne : sont les paroles douces et les bonnes paroles, qui ne vieillissent pas aussi longtemps que durentla terre et le sable.

Ni le soleil, ni le vent, ni l’eau, ni la poussière n’efl’acent la renommée et les bonnes paroles ; telle est la rotation du sort.

Heureux l’homme qui a de la pudeur et de la vertu !

Ô roi !

Ne commets pas, autant que tu pourras l’éviter, des péchés dont ton âme aurait honte ; cherche à ne faire du mal à personne et à être utile aux hommes ; c’est là le précepte et la loi de la religion.

Quant à moi, je laisserai comme souvenir quelques paroles et je crois qu’elles ne vieilliront jamais. »

Quand il eut rendu attentif par ces parole :

le cœur serein du roi, celui-ci lui fit beaucoup de questions.

Il lui demanda :

Qui est l’homme heureux, qui a le cœur satisfait et ne pousse jamais de soupirs ? »

Il répondit :

Celui qui ne pèche pas et qu’Ahriman ne détourne pas de la vraie voie. »

Le roi lui demanda ce qu’étaient la perversité et la voie du Div et quelle était la voie de Dieu, maître du monde.

Buzurdjmihr répondit :

Obéir à Dieu est ce qu’il y p a de mieux, car c’est lui qui est le dispensateur de la gloire dans les deux mondes.

La porte du vice conduit vers Ahriman, l’ennemi des hommes pieux.

Heureux l’homme qui porte haut le cœur et s’enveloppe dans la pureté et la chastetél ’âme étant le gardien de son corps, sa vie entière se passe doucement, il conserve la noblesse et la droiture et ne frappe pas à la porte du vice et de la perdition ; son âme sera épurée, après la mort, de tout ce qui tient au corps et ne regrettera rien de ce qui appartenait soit au fourreau, soit à l’épée dans cette vie.

Celui qui est maître de sa raison ne dirigera pas son âme du côté de la passion.

N’écoute pas ceux qui ont un esprit rusé, car ils font du mal aux âmes sereines ; ceux qui ne sont pas prêts à entrer dans la vie future en confessant leurs fautes demeurent ici pleins de chagrins ; ensuite sache que tout homme qui ne craint pas Dieu le tout-saint est vil.

Si quelqu’un voit avec déplaisir qu’un autre obtient une grâce, qu’il s’en aille et cesse de parler de ses désirs ; il ne connaît pas la partie de l’âme qui est la sagesse, il n’écoute pas le sage qui en parleur DES [ Kesra demanda :

Qui, parmi les inférieurs, peut se faire compter parmi les grands Il répondit :

Celui qui est le plus sage et gouverne le mieux ses passions. »

Le roi dit :

Qui est sage ?

Car la sagesse repose dans le secret des âmes. »

Il répondit :

Celui qui ne quitte pas la voie du maître du monde pour obéir au Div et qui dans sa folie n’écoute pas ceux qui sont ennemis de l’âme et opposés à l’essence de la raison.

Il y a dix Ahrimans qui ont la force des lions et dominent l’âme et la raison. »

Kesra dit :

Quels sont ces dix Divs sur lesquels la raison doit pleurer ? »

Il répondit :

L’avidité et le besoin sont deux Divs forts et fiers ; les autres sont la colère. l’envie, l’humeur querelleuse, la vengeance, la calomnie, la fausseté et la foi impure ; le dixième

’ Div est l’ingratitude envers les bienfaiteurs et l’irrévérence envers Dieu même. »

Le roi demanda :

Lequel de ces dix Ahrimans vils et nuisibles est le plus puissant ? »

Il répondit à Kesra :

C’est l’avidilé qui est le Div le plus tyrannique et le plus persistant ; jamais on ne le voit satisfait ; tout agrandissement n’est pour lui qu’une préparation pour de nouvelles acquisitions.

Le besoin est un Div qu’on voit aveugle et pâle à force de soucis et de peines.

Passons à un autre, ô roi et tu verras l’envie, un malade que le médecin ne peut guérir et qui souffre dans l’âme, si jamais il rencontre un homme heureux ; puis vient le Div querelleur, plein de litiges, aiguisant toujours les griffes pour faire le mal ; puis le Div de la vengeance, bruyant et colère, qui ne quitte pas des yeux l’homme contre lequel il est irrité ; il n’a ni générosité ni bonté pour personne, c’est un Div cruel, le visage froncé.

Un autre est le Div calomniateur, qui ne connaît que le mensonge, qui ne parle jamais à l’honneur de quelqu’un.

Reste le Div délateur, à double face, qui a arraché de son cœur la crainte du maître du monde, qui fait naître l’inimitié et la haine entre deux hommes et travaille à briser les amitiés ; enfin le Div ignorant et impie, qui ne reconnaît ni la raison ni le bien, qui méprise la pudeur et l’intelligence et aux yeux duquel le bien et le mal ce sont la même chose. »

Le roi demanda au sage :

Puisque le Div s’attaque au cœur de l’homme, qu’est-ce que Dieu a donné àses serviteurs pour se défendre contrelui ? »

Il répondit :

La main de la sagesse est plus forte que l’action des Ahrimans.

La raison est une cuirasse qui protège contre l’épée du Div, elle rend purs et brillants le cœur et l’âme du sage ; elle garde le souvenir du passé, elle nourrit l’esprit de savoir.

Puisse la raison être le guide de ton âme !

Car tu as encore.une longue route à parcourir.

Si elle devient ce que nous appelons une seconde nature, de sorte que le cœur, grâce à elle, ne craint plus le Div, ce cœur, plein de bons instincts, sera .

content du monde et ne s’approchera pas de la porte des passions. ’

Maintenant je vais prononcer des paroles pleines d’espérance qui guideront le cœur vers le bonheur.

L’homme qui a de la raison est toujours rempli d’espoir et ne voit dans le monde que du bonheur ; il ne pense jamais à faire du mal et choisit la voie droite de la flèche, au lieu de la voie courbe de l’arc.

Ensuite, celui qui est satisfait de sa fortune n’étandra plus la main et ne se fatiguera plus, il n’aura pas de soucis et ne pensera pas à l’argent et tous ses jours s’écouleront dans le bonheur.

Puis, celui qui est entièrement serviteur de Dieu nese détourne pas des ordres divins, pour éviter de la peine, pour gagner des trésors, ou pour plaire à quelqu’un ; il n’y a dans sa nature aucun élément mauvais, il est par là même vertueux en toute chose, car il ne vend à aucun prix la voie de Dieu. »

Kesra dit :

Laquelle parmi ces vertus est la prin-cipale et montre le chemin du bonheur ? »

Il répondit :

La voie de la raison est, sans aucun doute, préférerable à tout savoir ; ensuite une disposition aimable, qui fait que l’homme reste honoré pendant toute sa vie.

J’ai observé que, de toutes les qualités, la plus solide est le contentement de son sort, la plus douce, celle qui repose le mieux du travail et la plus agréable la faculté d’espérer ; mais celle qui donne le plus de fatigue est l’avidité, car elle n’est jamais rassasiée de trésors. »

Le roi demanda :

Quelle est la meilleure des facultés et qui donne le plus de grandeur à l’homme qui l’exerce ? »

Il répondit :

Celui qui ne se détourne jamais de la vraie voie évitera tout péché ; il atteindra à la gloire ’

et à la réussite ; le but atteint lui profitera et la réussite lui donnera de la gloires Le glorieux héros demanda :

Qui dois-je placer le premier sur cette route ? »

Buzurdjmihr répondit :

Celui qui parle chaleureusement avec une voix douce et ne cherche d’autre avantage que l’exercice de la raison, car la raison vaut certainement mieux que les talents. »

Ensuite le roi demanda au sage :

Qu’est-ce que l’homme peut apprendre de mieux ? »

Il répondit :

Le savoir est ce qu’il y a de mieux et le plus sage est le plus grand parmi les grands ; car il ne se jette pas violemment sur les richesses et il se préserve de la fatigue. »

Le roi demanda quel était l’ennemi le plus puissant et comment se défendre de lui ?

Il répondit :

Les mauvaises actions sont l’ennemi de l’esprit serein et de la raison. »

Le distributeur de la justice demanda au sage ce qui valait le mieux, l’instruction ou la naissance.

Son guide répondit :

L’instruction vaut mieux que la naissance, car elle fait l’ornement de l’âme, pendant qu’il n’y a pas beaucoup à dire sur la naissance.

Sans le "mérite, la naissance

est une chose triste, sans valeur et faible ; c’est par l’instruction que l’esprit devient vigoureux. »

Le roi dit :

Comment faut-il polir l’esprit et en quoi faut-il louer l’adresse du corps ’»

Il répondit :

Je vais dire tout ce que j’ai à dire, si tu veux me

-suivre de point en point.

Puisque la raison est un don de Dieu, ni le doute ni le mal ne peuvent la toucher ; mais si un homme de talent reste dans l’admiration dolai-même, il ne faut pas croire à ses talents.

Un laboureur qui est de bonne nature n’est point méprisable aux yeux du sage et un homme aurait beau réunir la naissance à la libéralité, au savoir, à la conduite et à la justice, sa puissance, sa richesse et sa droiture seront en pure perte s’il a un mauvais caractère. »

Kesra lui demanda :

Ô homme illustre et d’un bon caractère !

Devient-on puissant par ses propres efforts ou par l’effet de la fortune qui livre aux rois le trône et la couronne ? »

Il répondit :

La fortune et le talent forment comme un couple ; elles sont comme le corps et l’âme, qui sont amis et conjoints et dont la partie grossière est visible et la partie spirituelle cachée.

Le corps est l’instrument d’efforts pour l’homme, si la fortune qui veille sur lui est en ébullition, mais l’effort ne produit pas la puissance, si la fortune ne l’aide pas.

Le monde est une fable et un souille, c’est un songe que [se rappelle celui qui l’a eu, mais dont on ne retrouve rien au réveil, qu’il ait été agréable ou pénible et plein de colère. »

Ensuitele roi tira du secret de son esprit une nouvelle question et demanda au sage :

Qu’est-ce qui est digne de louanges ? »

Il répondit :

C’est un roi qui fait l’ornement du trône et à qui la fortune donne de la puissance ; s’il est juste et a une bonne renommée, ses paroles et ses actes atteindront leur but. »

Le roi demanda :

Qui, dans le monde, est alfligé, a de mauvais jours et est malheureux ? »

Il répondit :

L’homme pauvre et vil qui n’atteint ni

’ les objets de ses désirs ni le gai paradis. »

Le roi demanda :

Quel est l’homme assez malheureux . pour qu’on doive toujours pleurer sur lui ? »

Il névpondit : C’est l’homme savant dont le visage a pâli par sa mauvaise fortune. »

Il demanda :

Qui est-. ce qui est content et ne désire pas l’augmentation de ses richesses ? »

Le sage répondit :

C’est celui qui ne s’attache pas à ce que fait le ciel qui tourne. »

Le roi demanda :

Quel est l’homme qui nous est le plus agréable ? »

Il répondit :

Celui qui est le plus doux. »

Il demanda :

Qui est-ce qui est doux ?

Car il faut pleurer sur l’homme colère. »

Le sage répondit :

Observe qui détourne la tête quand ceux qui aiment à blâmer parlent ; c’est celui-là qui a de la décence et de la douceur, de la raison, de l’intelligence et de la convenance. »

Le roi illustre demanda :

Qui parmi les hommes

Peut espérer le plus ? »

Il répondit :

Celui qui est le plus attentif et dont les oreilles absorbent le plus avidement la sagesse. »

Le roi du monde le questionna sur les prédictions de [la bonne et de la mau-vaise fortune futures ; il répondit :

Les prédictions faussent souvent l’esprit et rendent vide le cerveau.

Si ce qu’elles énoncent ne vient pas de cette terre, je ne sais pas quelle idée me faire de l’autre monde.

Kesra dit :

Quel est le pays le plus riche et quelle part avons-nous dans cette prospérité ? »

Il répondit :

C’est par la justice du maître du monde que les pays se maintiennent prospères. »

Il demanda :

.Dis-moi quel est l’homme le plus éveillé, le plus précieux et le plus intelligent dans le monde, pour que je fasse profiter ma gloire de sa sagesse. »

Il répondit :

Un vieillard savant qui a profité de l’expérience. »

Kesra lui demanda :

Quel est l’homme le plus satisfait et qui est toujours soutenu par la joie ? »

Il répondit :

Celui qui est exempt de toute inquiétude et possède de l’or et de l’argent. »

Le roi demanda :

Pour quelle qualité nous loue-

t-on le plus volontiers et qui est-ce qui est agréable à tout le monde ? »

Il répondit :

Celui qui sait cacher ses besoins, son envie, sa vanité et sa convoitise ne laissera pas voir de l’esprit de vengeance et de jalousie et sera agréable à tous. »

Le roi demanda quel est l’homme patient qui porte sur son front le diadème de la persévérance ; il répondit :

C’est celui qui désespère de la fortune et dont néanmoins les joues brillent comme le soleil ; ensuite celui qui doit compter les jours et qui travaille à une grande entreprise. »

Il demanda :

Quel est l’homme le plus affligé, si afih’ge’ qu’il est las de la ’

vie par l’excès des chagrins ? »

Le sage répondit :

Celui qui est tombé du trône et désespère de rétablir sa fortune. »

Le puissant roi demanda :

Qui parmi nous a le cœur le plus désolé ? »

Il répondit :

Celui qui est privé de raison et un homme puissant qui n’a pas d’enfant. »

Le roi demanda quel était l’homme le plus malheureux, qui se consumait de tristesse sans avoir aéprouvé de malheur.

Il répondit :

L’homme plein de sagesse et de vertu qui a affaire à un roi frivole. »

Le roi dit :

Y a-t-il un homme qui désespère malgré une grande fortune ? »

Il dit :

Celui qui est forcé d’abandonner une grande entreprise reste mécontent et aigri. »

Le roi Nouschirwan lui dit :

V0 homme clairvoyant et dont la fortune est jeune !

Connais-tu un homme sans renom et sans distinclion qui soit digne de tendresse et de charité ? »

Il répondit :

L’homme qui a commis beaucoup de fautes, le pauvre coupable et sans appui. »

Le roi demanda :

Dis-moi, selon la vérité, qui est-ce qui se repent du passé ? »

Il répondit :

Un roi qui pose au jour de la mort le casque noir sur sa tête se re-

peut et son cœur est plein de terreur de ce que son âme n’a pas été assez reconnaissante envers Dieu, ensuite celui qui a fait beaucoup pour les ingrats qui l’entourent. »

Il demanda :

Ô homme intelligent, qui réunis tous les talents !

Connais-tu une chose qui préserve le corps de tout mal et qui est en même temps de grand prix pour le cœur de tout le monde. »

Il répondit :

Quand on a de la santé, le cœur ne désire que de la joie et l’on a envie de santé quand le corps est abattu par la souffrance. »

Le roi demanda :

Quel est le désir le plus vif ?

Dis-le moi,

ô homme de bon caractèrel»

Il répondit :

Quand on a du pouvoir, on désire, avant tout, se mettre au-dessus de tout besoin ; quand on est riche et bien portant, alors on n’a plus à rechercher que la satisfaction de son cœur. »

Ensuite le roi demanda à son conseiller :

Quel est le principal souci du cœur ? »

Il répondit :

L’homme de sens peut en indiquer trois à celui qui le consulte.

D’abord il s’inquiète du jour de malheur, pour qu’il ne lui arrive pas de mal sans sa faute ; ensuite il craint les machinations de faux amis qui en voudraient à sa tête, à sa vie, à son sang et à sa peau ; enfin il se méfie d’un roi injuste, qui ne distingue pas un homme vertueux d’un vaurien.

Que la rotation du sort serait donc heureuse, si l’on rencontrait un

. ami plein de raison qui vous servirait de maître un monde plein de lumière et un roi plein de justice !

Le ciel ne pourrait donner à l’homme un plus grand bonheur. »

Le roi lui fit des questions sur la foi et la droiture, qui doivent écarter le malheur de la perdition.

Il répondit :

Ô roi !

Attache-toi aux hommes croyants qui n’oublient pas le nom de Dieu, qui se tiennent loin de la perversité et de la voie du Div, vivent dans la crainte du maître du monde, sont attentifs aux ordres de Dieu et dont aucun ne vend sa foi. »

Puis, il le questionna sur les rois qui gouvernent les hommes vertueux, demandant qui, parmi eux, avait une fortune victorieuse et qui était digne du trône.

Le sage répondit :

Celui qui est juste, qui a de la raison, de la délicatesse, de l’intelligence et de la capacité. »

Le roi lui fit des questions sur d’anciens amis avec qui on peut demeurer et converser ; il répondit :

Il faut qu’un ami ait de la générosité et de la justice, alors il ne te voudra pas du mal pour plaire à un autre, ette soutiendra et t’aidera dans l’adversité. »

Nouschirwan demanda :

Qui est-ce qui a le plus d’amis ayant tout en commun avec lui, jusqu’au sang et à la peau ? »

Il répondit :

Il n’y a qu’un méchant homme qui se sépare jamais d’un homme au cœur bon et le plus accueillant, le plus riche en bonnes actions et le plus accommodant ale plus d’amis. »

Il demanda :

Qui a le plus d’enb nemis et les plus acharnés contre lui ? »

Le sage répondit :

Celui qui est hautain et querelleur, en ; suite un homme qui a la voix dure, le visage froncé et les deux poings fermés. »

Le roi dit :

Qui est un ami à tout jamais et qu’il faut pleurer quand on a la douleur d’être séparé de lui ? »

Il répondit :

Le compagnon qui ne varie pas, ne blesse pas, ne craint pas de souffrir pour toi. »

Kesra demanda :

Qu’est-ce qui dure toujours et n’est jamais sujet à diminuer ? »

Il répondit :

Un bienfait n’est jamais oublié par un véritable ami?l Le roi demanda :

Qu’est-ce qu’il y a de plus brillant et qui forme le diadème le plus élevé de l’humanité ? »

Il dit :

C’est l’âme du sage qui est la maîtresse de ses désirs. »

Le roi demanda :

Ô homme affectueux !

Qu’y a-t-il de plus grand que le ciel ? »

Il répondit :

Un roi à la main ouverte et le cœur d’un homme qui adore Dieu. »

Le roi demanda :

Quelle est la chose la plus honorable et dont un homme de sens s’enorgueillit le plus ? »

Il répondit :

Ô roi !

Ne donne jamais des trésors à des hommes impurs ; faire du bien aux ingrats est jeter dans l’eau des briques séchées au soleil. »

L Le roi demanda :

Quelle est la fatigue qui dégoûte l’homme de l’envie d’acquérir des richesses ? »

Il répondit :

Ô roi, puisse ton cœur ressembler toujours au printemps !

Le serviteur d’un roi de mau-vaise nature finit, à force de soull’rir, par renoncer aux richesses et à la vie. »

Le roi demanda :

Quelle merveille as-tu vue au-delà de laquelle on ne puisse rien concevoir ? »

Buzurdjmihr répondit au roi :

Tout ce que fait le ciel est merveilleux.

Tantôt on voit un homme puissant, dont le diadème atteint les nuages noirs et qui pourtant ne sait pas distinguer la main droite de la gauche et qui ne comprend pas si sa fortune hausse ou baisse ; tantôt un autre qui, par la rotation du ciel sublime, sait prédire le mouvement des astres et pour qui néanmoins le ciel n’est qu’un guide de malheur et dont la part dans la vie n’est qu’une destinée amère. »

Le roi demanda I.

Quelle est la chose la plus lourde ? »

Il répondit :

Le poids du péché. »

Le roi demanda :

Qui est-ce que tout le monde blâme, condamne et traite de méchant pour sa mauvaise conduite en paroles ou en actes ? »

Il répondit :

Un grossier qui vexe un innocent, un riche qui se nourrit à peine et se refuse les vêtements et l’entretien, une femme ce éhOntée et qui ne parle pas d’une voix douce, un homme bon qui agit avec précipitation, un pauvre qui affecte la grandeur.

Enfin, le mensonge est, pour le valet comme pour le roi, la chose la plus malséante, la plus vile et la plus basse. »

Le roi demanda :

Qu’y a-t-il de mieux dans le monde, tant en public qu’en secret, de sorte que a7

Celui qui le sait peut s’en faire une cuirasse et donner de la sérénité à son âme ?

Il répondit :

Celui qui est sérieux dans la foi ne trouvera dans le monde que de la vénération ; ensuite celui qui est reconnaissant à Dieu est un homme sage qui comprend ce qui est bien. »

Kesra demanda :

Qu’est-ce qu’il y a de mieux à faire et qu’est-ce qu’il faut se garder de faire, qu’on soit roi ou homme du commun ?

En quoi vaut-il mieux commander et dominer et en quoi passer avec dédain auprès des hommes ?

De quoi faut-il s’abstenir et que faut-il saisir pour le retenir ? »

Il répondit :

Gardez-vous de la colère quand quelqu’un ferme les yeux sur ceux qui commettent des fautes.

Ensnite, tiens ton esprit éveillé, et, autant que tu le peux, défends-toi de toute participation à de mauvaises actions.

L’âme de celui qui renonce à la rancuneet reprend de l’espoir brille comme le soleil.

Quel que soit le salaire que tu pourrais obtenir pour un crime, rejette le salaire, tiens-toi loin du crime. »

Grâce au Maître du soleil et de la lune, j’en ai fini avec les dùmrs de Buzurdjmihr et du roi et cette matière, qui aura charmé ton cœur, étant épuisée, il faut que je raconte l’histoire du jeu d’échecs.

Dernière mise à jour : 28 déc. 2021