Keï Khosrou

Keï Khosrou s'empare de Gangue-Diz

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Pendant toute la nuit et jusqu’à ce que le soleil se fût levé à l’horizon et eût fait briller la montagne comme le dos d’un éléphant blanc, Afrasiab s’occupa à mettre en ordre son armée et aucun Turc ne se livra au sommeil.

Lorsque le son des timbales se fil entendre à Gangue, la terre se couvrit de fer et l’air se remplit d’une poussière noire et Khosrou, le chef des Mobeds, le roi bienveillant, monta à cheval à l’aube du jour.

Il fit le tour de la ville et forma son plan de bataille.

Il ordonna à Rustem de se porter sur un côté de la ville avec un corps d’armée, qui ressemblait à une montagne ; d’un autre côté devait se tenir Gustehem fils de Newder ; du troisième, Gouderz, dont le conseil portait bonheur ; enfin au quatrième côté resta le roi, qui accomplissait toujours sa volonté, avec ses timbales, ses éléphants et ses vaillants cavaliers.

Il distribua à ses troupes toutes les armes dont elles avaient besoin et s’avança contre la ville.

Il ordonna à l’armée de creuser un fossé autour des murs et tous ceux qui étaient propres à ce travail et pouvaient servir dans l’attaque de la ville, qu’ils fussent de la Chine ou du pays de Roum, qu’ils fussent des Mobeds ou des héros expérimentés de tous les pays, entourèrent rapidement la ville et employèrent toute leur habileté.

Il fit creuser ainsi un fossé profond de deux longueurs de lance et rangea son armée tout autour, pour que les Turcs ne pussent pas faire une sortie inattendue pendant la nuit.

Il fit placer en face de chaque porte deux cents balistes et établir derrière les troupes deux cents catapultes ; ensuite il disposa deux cents arbalètes auprès de chaque porte, de sorte que, lorsqu’un ennemi se . montrerait sur les murs, les catapultes versassent une grêle de pierres sur lui et lui écrasassent la tête, pendant que les hommes de Roum, armés et munis de leurs arbalètes, se tiendraient derrière la ligne des catapultes ; enfin il ordonna que deux cents éléphants fussent placés tout autour des fortifications de la ville.

Le fossé qu’on creusait entamait les fondations du mur ; on y plaçait des colonnes de bois et l’on soutenait ainsi le mur en lui faisant une base de troncs d’arbres ; ensuite on recouvrait ce bois d’une couche de naphte noir : c’était le roi qui avait ordonné cette ruse.

Les pierres que lançaient les machines et les flèches des arbalètes firent pâlir les joues des braves : au-dessous se trouvaient le feu, le naphte et le bois et au-dessus, les coups des lourdes massues.

Ayant préparé ainsi l’attaque des quatre côtés, comme on doit faire dans un siège, le roi de la terre s’éloigna pour prier Dieu ; il quitta l’armée, se rendit au lieu des prières et s’adressa en secret au Maître du monde ; il invoqua Dieu ; dans son désir de vengeance, il se tordit dans la poussière comme un serpent, disant :

L’accomplissement des vœux et la puissance viennent de toi ; en tout danger, le secours vient de toi.

Si tu vois que ce que je veux est juste, ne me force pas d’abandonner ce lieu, renverse ces magiciens de leur trône, contente mon cœur et rends-moi favorable la fortune. »

Il releva la tête après sa prière et revêtit d’une cuirasse sa poitrine brillante, prit ses armes et s’élança au combat, rapide comme la fumée.

Il ordonna que chaque porte fût attaquée fortement. par un corps d’armée ; on mit le feu au bois et au naphte ; on lança des pierres à la tête des assiégés.

Le bruit des arbalètes et la fumée obscurcirent la face radieuse du soleil ; la terre devint bleue, le ciel couleur de lapislazuli à cause de la poussière que faisaient lever les balistes et les catapultes ; on entendait les cris des éléphants et les voix deschefs ; on voyait les éclairs des épées et des lourdes massues, on au- rait dit que la lune et le soleil se combattaient, tant il pleuvait des coups d’épées et tant la poussière était noire.

Le naphte incendia les troncs d’arbres, qui, par la. permission de Dieu, brûlaient comme du bois de chauffage ; on aurait dit que la muraille se soulevait et s’écroulait comme une montagne.

Un grand nombre de Turcs vaillants furent précipités de ces murs ainsi que des lions qui tombent inopinément dans une fosse et la vie de ces hommes que la fortune avait abandonnés se termina.

Un cri de victoire s’éleva de l’armée du roi au milieu du combat ; tous tournèrent leurs yeux vers la brèche de la forteresse et Rustem accourut avide de combats.

Afrasiab apprit aussitôt de quel côté le mur de la ville s’écroulait ; il arriva, rapide comme la poussière qui vole, criant à Djehn et à Guersiwez :

Qu’importe la muraille ?

C’est avec les épées qu’une armée doit former ses murs.

Pour sauver le pays et vos enfants, pour sauver vos trésors et vos parents. liez ensemble les pans de vos cottes de maille et ne laissez pas autour de vous ces ennemis. »

Toute une 9

9h armée de Turcs, semblable à une montagne, se jeta sur la brèche en bataillons serrés, ils combattirent comme des lions et une immense clameur s’éleva des deux côtés ; les cavaliers Turcs tremblaient comme les feuilles du saule et désespéraient du salut de leur pays.

Alors le roi ordonna à Rustem de faire mettre pied à terre à tous ceux qui portaient des lances et de les faire avancer contre la brèche ; un grand nombre de héros illustres. avides de combats, armés de carquois, d’épées, de flèches et de haches d’armes se tinrent à cheval derrière Rustem, le glorieux ; le vaillant roi lui-même les dirigeait au plus fort de la lutte.

Les cavaliers et les fantassins des deux armées se jetèrent dans le combat par masses semblables à des montagnes.

Rustem, avide de vengeance, amena toutes ses troupes sur la brèche, comme un lion furieux ; il s’avança à pied, rapidement comme la poussière, abattit le drapeau noir d’Afrasiab et planta sur le mur le drapeau violet du roi de l’Iran, qui n portait une figure de lion ; le cri victorieux de l’armée du roi d’Iran retentit du champ de bataille, un grand nombre de Turcs furent tués et la fortune des Touraniens baissa.

Au moment où le combat fut le plus acharné, Rustem saisit de sa main et jeta par terre deux hommes, Guersiwez et le vaillant Djehn, les soutiens du trône de Touran, le frère et l’illustre fils d’Afrasiab et c’est ainsi qu’ils succombèrent à leur mauvaise fortune.

Km Kaosaou.

L’armée des Iraniens entra dans la ville, une armée au cœur ulcéré et avide de vengeance ; elle se mit à saccager et à tuer et l’on n’entendit que des clameurs et des lamentations ; les enfants et les femmes poussaient des cris et abandonnaient leurs maisons aux ; Iraniens ; mais que de femmes, que d’enfants en bas âge qui disparurent sous les pieds des éléphants !

Toute la ville fuyait comme le vent, personne ne pensait plus à son pays, tous les yeux étaient remplis de sang dans cette détresse, car la fortune des héros du Touran était vaincue ; leurs femmes et leurs enfants étaient captifs, leurs trésors pris, leurs âmes blessées par le ciel, leurs corps percés de flèches.

Dernière mise à jour : 19 déc. 2021