Keï Khosrou

Afrasiab échappe à Houm

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Houm lia ainsi les bras à Afrasiab et l’entraîna du lieu de sa retraite.

Afrasiab lui dit.

O homme intelligent et pieux, qui adores Dieu le très-saint, que veux-tu de moi, qui suis un roi sur la terre, demeurant dans cette cave et me tenant caché ? »

Houm lui répondit :

Ta place n’est pas ici, le monde est rempli de ton nom, du nom de celui qui a tué un frère parmi les rois de la terre, qui a offensé Dieu par le meurtre d’Aghrires, de l’illustre Newder et de Siawusch, l’héritier des Keïanides.

Ne verse pas le sang des rois, pour n’avoir pas à échanger ton palais contre une caverne sans fond. »

Afrasiab lui répondit :

Ô homme puissant, qui trouves-tu sans faute dans le monde ?

La rotation du ciel tout-puissant a fait de moi un instrument de peine, de fatigues et de ruine ; mais personne ne peut se soustraire aux ordres de Dieu, quand même il poserait son pied sur le cou du dragon.

Je suis malheureux, aie donc pitié de moi, quoique j’aie commis des injustices.

Je suis le petit-fils de Feridoun le bienheureux ; relâche les liens de ton lacet.

Où veux-tu me conduire lié ignominieusement ?

Ne crains-tu pas Dieu et le jour où tu lui rendras compte ? »

* Houm répondit :

Ô homme méchant et malveillant, probablement il ne te reste pas beaucoup de temps.

Tes paroles sont douces comme un frais jardin, de roses ; mais ton sort est entre les mains de Khosrou. »

Néanmoins son cœur souffrait de cet état misérable et il relâcha les nœuds de son lacet royal.

Afrasiab, voyant que ce saint homme était ému des plaintes d’un roi, s’arracha de ses mains par un effort violent et plongea dans le lac, où il disparut.

Or il arriva que Gouderz fils de Keschwad s’amusait à courir dans les environs de la résidence du roi avec Guiv et d’autres nobles et qu’il s’approcha du laç avec son cortège.

Il aperçut Houm qui tenait son lacet et courait sur le bord de l’eau comme un homme ivre.

Il vit aussi que l’eau était trouble ; il observa ce serviteur de Dieu qui avait les yeux égarés et dit en lui-même :

Est-ce que ce saint homme pêcherait dans le lac de Khandjest ?

Un crocodile aurait-il saisi l’hameçon destiné à un poisson et l’homme serait-il confondu à cet aspect ? »

Il dit à Houm :

Ô saint homme, fais-moi connaître ton secret ; que cherches-tu dans cette eau du lac ?

Est-ce que tu veux y laver ton corps malpropre ? »

Houm lui répondit :

Ô toi qui portes haut la tête, fais pour un instant attention à ce qui m’arrive.

J’ai une demeure sur le haut de cette montagne, où un serviteur de Dieu peut adorer loin de la foule.

Je me tenais devant Dieu dans la nuit sombre, livré à l’adoration pendant toute la nuit ; mais, à l’heure où

un les oiseaux font entendre leurs voix, des accents plaintifs ont frappé mon oreille.

À l’instant mon esprit lucide m’a donné l’idée que je pouvais arracher du monde la racine de tant de vengeances, parce que de telles plaintes, à l’heure du sommeil, ne pouvaient venir que d’Afrasiab.

Je me suis levé, j’ai cherché dans toute la montagne et dans toutes les cavernes et j’ai fini par voir l’entrée de la retraite de l’homme qui se plaignait.

Le misérable était couché dans son antre, pleurant amèrement sa couronne et son trône.

Lorsque je suis entré, il s’est mis debout et s’est roidi avec les deux pieds contre le rocher ; mais je lui ai lié avec mon cordon les deux mains si serrées qu’elles devinrent dures comme une pierre, de sorte que le sang sortait de ses ongles ; ensuite je l’ai traîné en courant hors de la montagne pendant qu’il criait et se lamentait comme une femme :

il s’est tant plaint, a tant crié et fait tant de serments, qu’à la fin j’ai relâché ses liens et c’est ici qu’il a échappé à ma main et mon cœur et mon âme sont brisés de sa fuite.

Il s’est caché dans ce lac de Khandjest.

Je t’ai dit tout se-’ Ion la vérité. »

-Lorsque Gouderz eut entendu ce récit, il lui vint en mémoire d’anciennes prophéties ; il s’en retourna vers le temple d’Aderguschasp, tout pensif et comme un homme qui a perdu la raison.

Il commença par adorer le feu et adressa des prières au Créateur du monde ; ayant fini ses dévotions, il dévoila son secret et raconta aux deux rois ce qu’il avait vu et les rois montèrent à l’instant à cheval et quittèrent le palais attenant au temple d’Aderguschasp.

Dernière mise à jour : 19 déc. 2021