Keï Kaous

1ère aventure - Raksch combat un lion

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Le preux qui était la gloire du monde quitta son père et le pays de Nimrouz.

Il fit en un seul jour deux journées de marche, tenant la nuit sombre pour aussi bonne que le jour ; ainsi le pied de Raksch foula la route également pendant le jour lumineux et pendant la nuit noire.

Lorsque Rustem eut faim et qu’il se sentit fatigué, il arriva dans une plaine remplie d’onagres ; il eut envie d’en prendre un et serra Raksch du genou et la course de l’onagre devint lourde comparée à la sienne ; car aucune bête fauve n’avait de chances devant Rustem à cheval, devant son lacet et le pied de Raksch.

Le lion lança son lacet royal et prit dans le nœud l’onagre vigoureux ; puis il alluma du feu avec la pointe d’une flèche et le nourrit de ronces et de branches d’arbres ; et lorsque l’onagre eut perdu toute vie et tout mouvement, il le fit rôtir à ce feu ardent, puis le mangea et jeta les os loin de lui : ainsi l’onagre même lui servit de marmite et de table.

Ensuite, il ôta la bride à Raksch, l’envoya paître dans la prairie et se prépara une couche dans un champ de roseaux, regardant un séjour d’effroi comme une demeure suffisamment sûre pour lui-même.

Au milieu de ces roseaux était le gîte d’un lion et un éléphant n’aurait pas osé les couper.

Lorsque la première veille fut passée, le terrible lion rentra dans son gîte et vit avec étonnement, couché sur les roseaux, un homme d’une stature d’éléphant et devant lui un cheval.

Il se dit :

Il faut que je déchire d’abord le cheval, alors le cavalier sera à moi quand je voudrai.

Puis, il courut en bondissant vers Raksch le brillant.

Mais celui-ci s’élança comme le feu, leva ses deux pieds de devant et frappa le lion sur la tête ; il le saisit avec ses dents aiguës par le dos et en battit la terre jusqu’à ce qu’il l’eût mis en lambeaux ; c’est par ce moyen qu’il tua la bête féroce.

Lorsque Rustem prompt à combattre fut réveillé, il vit que le monde était devenu étroit par la masse de ce terrible lion et il dit à Raksch :

Ô prudent animal !

Qui t’a ordonné de combattre un lion ?

Si tu étais tombé sous ses griffes, comment aurais-je porté jusque dans le Mazenderan cette cuirasse et ce casque de guerrier et mon lacet, mon arc, mon épée et cette lourde massue ?

Si j’avais été averti dans mon doux sommeil, ton combat avec le lion aurait été court.

Ainsi dit le héros renommé, le guerrier vaillant se remit à dormir et se reposa longuement.

Enfin, lorsque le soleil leva sa tête au-dessus des sombres montagnes, Rustem se réveilla de son doux sommeil, encore tout fatigué.

Il étrilla Raksch, lui mit la selle sur le dos et adressa ses prières à Dieu qui répand les grâces.

Dernière mise à jour : 7 sept. 2021