Bahram Gour

Le grand Mobed de Bahram détruit un bourg et le fait refleurir

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Un autre jour le roi alla avec’son cortège, de grand matin, dans la plaine pour chasser ; à sa gauche était Hormuz, son vizir, à sa droite le Grand Mobed, homme de bon conseil, qui lui récitèrent des histoires et parlèrent de Djemschid et de Ferij doun et au-devant étaient les chiens, les guépards, les gerfauts et les faucons.

Il courut sur la plaine pendant une longue journée ; mais quand le soleil fut arrivé au haut de la voûte du ciel, sans qu’on eût aperçu la trace d’un onagre ou d’une gazelle, le roi commença à souffrir de l’ardeur du soleil et quitta le lieu de la chasse en mauvaise humeur.

Il arrivavà un lieu plein de verdure, de maisons, d’hommes et de bestiaux ; c’était un lieu cultivé et gai, un lieu où se reposer et oublier les soucis.

Un grand nombre des gens du bourg étaient allés sur la route et au-devant de l’escorte pour regarder et le roi du monde, qui avait chaud et était en colère, avait envie de mettre pied à terre dans ce bourg ; mais aucun des habitants ne présenta ses hommages et l’on aurait dit que ces ânes étaient enchaînés au sol.

Le roi fut irrité contre ces gens ; il jeta sur [n eux des regards peu bienveillants et dit au Mobed :

Puisse un endroit qui a une aussi mauvaise étoile devenir le repaire des bêtes fauves et du gibier !

Puisse l’eau dans le ruisseau de ces gens devenir de la poix In Le Mobed comprit ce que le roi’ voulait qu’il fit et se dirigea vers le bourg.

Aussitôt qu’il y fut arrivé. il convoqua tous les notables de l’endroit et leur dit :

Écoutez le message du roi et ne vous écartez en rien de ses paroles. »

Puis, il confirma :

Ce lieu’ plein de verdure, de fruits, d’hommes et de bestiaux, a plu à Bahram, roi des rois et il a conçu une bonne idée dans votre intérêt.

Il vous nomme tous seigneurs, pour faire une ville de ce beau bourg.

Ainsi tous ici, femmes et enfants, vous êtes des seigneurs et n’avez plus à obéir à personne, il n’y a plus ni salarié ni maître et tous doivent se tenir peur égaux.

Vous tous, femmesr et enfants, êtes des seigneurs et tous et chacunde vous êtes maîtres du bourg. »

Il s’éleva de ce riche bourg des cris de joie de ce que tous étaient devenus seigneurs, et, à partir de ce moment, les hommes et les femmes avaient une autorité égale et les serviteurs et gens à gages étaient les égauæ desmaltres.

Les jeunes gens du village, qui n’étaient plus con : tenus par la crainte, coupèrent la tête aux anciens seigneurs.

Tous s’entre-attaquèrent et se tuèrent dans les lieux écartés.

Lorsque ; ce bouleversement eut en-

Vahi le bourg, les habitants s’empressèrent de le déserter ; les vieux et faibles restèrent, mais les instruments de culture, les outils et les récoltes disparurent : tout l’endroit offrait l’aspect de la désolation, les arbres desséchaient et le ruisseau était sans eau, la terré était un désert, les maisons étaient abandonnées et les. hommes et les bestiaux avaient fui.

Une année se passa, le printemps revint et le roi se dirigea de ce côté pour chasser.

Il arriva à ce lieu jadis gai et cultivé, il regarda et vit que’rién n’était debout ; les arbres étaient desséchés, les maisons désertes, tout le pays sans hommes et sans bestiaux.

À cet aspect la joue du roi Bahram pâlit ; il eut peur de Dieu et fut plein de douleur.

Il dit au Mobed :

Ô Rouzbehl hélas, ce beau bourg est,désert !

Va vite et repeuple-le à l’aide de mon trésor.

Fais en sorte que ces gens prospèrent dorénavant. »

Le Mobed quitta le. roi des rois et se rendit en toute hâte à cet endroit désolé ; il alla de rue en rue et trouva à la fin un vieillard désœuvré.

Il descendit de cheval, aborda poliment le vieillard, le fit asseoir à côté de lui et dit :

Ô mon vieux maître, qui donc a rendu désert ce lieu qui était si peuplé ? »

Il répondit :

Un jour le roi a passé par ce pays et il est venu un Mobed insensé, un de ces grands qui ne font rien de bon ; il nous a dit que nous étions tous des seigneurs, que nous n’avions à compter 1’ personne pour rien, que nous étions tous maîtres du bourg et que les femmes et les enfants étaient plus que les grands seigneurs.

À la suite de ce discours le bourg se remplit de discorde, de pillage, de meurtres et de coups.

Puisse Dieu le récompenser selon .son mérite !

Puissent les chagrins, les peines et la misère ne jamais cesser pour lui !

Tout dans ce lieu est au plus mal ; sache qu’il faut pleurer sur nousnr Bouzbeh fut affligé des paroles du vieillard et lui demanda que ! était leur’chef.

Le vieillard répondit :

Qui peut être chef dans un pays qui ne produit que de la graine d’herbe il»

Rouzbeh lui dit :

Sois chef toi-même, sois en loute chose comme le diadème sur la tête du pays.

Demande de l’argent au trésor du roi, demande des semences, des bœufs, des ânes et des vivres.

Attiré dans le village ceux que tu trouves désœuvrés, ils seront. les subordonnés et tu seras le chef.

Ne maudis pas ce vieux Mobed, ce n’est pas avec intention qu’il a tenu ce langage.

Si tu as besoind’un homme de la cour pour t’appuyer, je t’en enverrai un ; demande toute chose dont tu auras besoin. »

Ces paroles réjouirent le vieillard ; il fut délivré de ses longs soucis ; il rentra à l’instant dans sa maison et amena des hommes là où il y avait des réservoirs d’eau ; il s’applique à repeupler le pays et à distribuer les champs.

Un demanda aux voisins

Des bœufs et des ânes, on travailla dans toute la plaine.

Lui et les autres habitants firent de grands efforts ; ils plantèrent partout des arbres et quand un champ était ensemencé tous les cœurs en étaient dans la joie.

Ceux qui s’étaient enfuis de ce lieu et avaient versé des larmes du sang de leur cœur, lorsqu’ils apprirent que le bourg était habité de nouveau et combien de peine se donnait le vieux chef, se tournèrent tous vers leur bourg et rétablirent les rues et les courants d’eau.

Les poules, les vaches, ’ les ânes et les moutons multiplièrent chez tous les cultivateurs ; chacun plantait partout des arbres et ce lieu, naguère désert, devint comme un paradis.

La troisième année le chef mit en ordre le bourg ; tout ce qu’il avait semé prospérait selon ses désirs et lorsque le gai printemps fut arrivé dans sa saison, le roi se dirigea vers cette plaine pour chasser, accompagné de son Grand Mobed Rouzbeh.

Quand ils furent tous les deux près du bourg, le brillant roi Bahram Gour regarda autour de lui et vit la terre pleine de champs cultivés et de bestiaux, de grandes maisons qu’on avait élevées, le bourg rempli de vaches et de moutons, partout des jardins et de l’eau, des champs ensemencés et du blé qui poussait, toute la plaine diaprée de tulipes et de fenugrec et des brebis et des agneaux dispersés sur la montagne ; enfin tout le pays était devenu un paradis. 1 1 : Bahram dit au Mobed :

Ô Rouzbehl qu’astu fait pour rendre désert ce bourg plein de verdure et pour disperser les hommes et les troupeaux et qu’as-tu donné maintenant pour le rétablir Le Mobed répondit :

C’est par un seul mot que ce grand et vieux endroit est tombé et de même une seule idée l’a peuplé de nouveau, de manière à réjouir le cœur du roi d’Iran.

Le roi m’avait 0rdonné de faire disparaître avec l’argent du trésor ce lieu plein de verdure, maisj’ai eu peur du Créa-

œ teur du monde et du blâme des grands et des petits.

J’avais observé que, quand deux amis qui n’étaient qu’un cœur conçoivent deux idées déférentes, elles les détruisent en peu de temps tous les deux ; de même, s’il y a deux maîtres dans une ville, il ne ce reste bientôt rien de ce pays ; car un homme de sens nserait bientôt étonné s’il voyait faire une seule

œuvre paisiblement par deux hommes.

Je suis allé dans le bourg et j’ai dit aux vieillards que chez eux il n’y avait plus de supérieurs ; que les femmes et les enfants, les serviteurs, les hommes à gages et les intrus étaient égaux aux maîtres.

Ceux qui étaient inférieurs devinrent donc comme les seice gneurs et les têtes des hommes puissants tombèrent bientôt.

Ce niest que par des paroles que ce beau lieu a été réduit en désert.

Puissent les reproches et la crainte des châtiments de Dieu rester loin de ce moi l

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Plus tard le roi leur a pardonné, j’y suis allé et leur ai montré une autre route.

J’y ai placé, comme chef, un vieillard intelligent, parlant bien, instruit et propre à guider des hommes.

Il s’est donné de la peine et a peuplé ce désert et ses subordonnés sont heureux par lui.

Lorsqu’il n’y eut plus qu’un maître et que ce fut un homme de sens, le bien a augmenté et le mal a diminué.

Je leur avais monrrtré en secret la voie du mal, puis je leur ai ouvert la porte de Dieu.

La parole vaut plus que des joyaux dignes d’un roi, si on l’emploie à sa véritable place.

Il faut que le jugement soit roi et que la langue soit son Pehlewan, si l’on veut que l’esprit échappe au chagrin. »

Le roi lui dit :

C’est bien fait, ô Bouzbehl tu es digne d’une couronnes Il donna une tonne d’or jaune à cet homme habile et prévoyant, on lui prépara une robe d’honneur royale et on éleva sa bête jusqu’aux nues.

Dernière mise à jour : 28 déc. 2021