Kesra Nouschirwan

Bataille entre Gau et Thalhend

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Lorsque le soleil leva la tête dans le signe du Lion, la terre devint brillante comme une mer d’eau ; le soleil apporta une étoile jaune et l’étendit sur la voûte sombre du ciel ; on entendit le son des trompettes et le bruit des timbales qui s’élevait des enceintes des tentes des deux princes ; les étendards des jeunes rois parurent, les ailes droite et gauche se formèrent ; les deux princes, qui portaient haut la tête, se rendirent au centre des lignes et leurs savants Destours se placèrent à leurs côtés. 3& Gau ordonna à son précepteur de dire à haute voix aux chefs :

Plantez chacun votre drapeau, tirez tous vos épées bleues ; aucun des héros ne doit s’avancer, aucun fantassin ne doit. quitter son poste car celui qui est impatient au jour du combat n’est y ni un homme intelligent ni un homme de valeur. 1 Je veux voir comment Thalhend avec son armée se présentera sur le champ de bataille.

Bien ne se fait depuis le soleil brillant jusqu’à la terre sombre que selon la volonté de Dieu, le tout-saint et mon espoir est que le sort qu’il m’accordera sera glorieux.

Nous avons essayé des conseils, nous avons parlé avec beaucoup de tendresse, mais Thalhend n’a rien agréé.

Ne versez pas du sang pour vous enrichir, car vous aurez des trésors qui sont tout prêts ; et si un vaillant homme de cette armée s’élance du centre avec ardeur et rencontre dans la mêlée Thalhend, il ne doit pas le couvrir de poussière de tuer).

Il faut nous avancer contre les éléphants furieux, les reins fortement ceints, mais animés de sentiments de tendresse. »

L’armée répondit par ce cri :

Nous obéirons, nous ferons de ta volonté la règle de nos âmes. »

Y De l’autre côté, Thalhend dit devant le front de son armée :

Ô gardiens du trône !

Pour que nous soyons victorieux, pour que la rotation des astres nous accorde le fruit du bonheur, tirez tous l’épée de la vengeance, contiez-vous en Dieu et frappez 3M l’ennemi.

Si vous rencontrez Gau, ne le tuez pas, ne lui dites pas un mot dur, enlevez-le du dos de son éléphant furieux et amenez-le-moi les mains liées un À ce moment le son des trompettes s’éleva du pavillon de l’enceinte des tentes royales ; les cris des chevaux, la poussière que soulevaient les chefs, le maniement des lourdes massues, remplirent les montagnes et les eaux de bruit ; on aurait dit que le ciel qui tourne reculait ; les clameurs et le fracas des haches d’armes étaient tels que personne ne distinguait plus les pieds des têtes ; les pointes brillantes et les plumes d’aigles des flèches remplissaient tellement l’air que le soleil repliait le pan de sa robe ; le monde devint comme une mer de sang, les têtes et les mains ployaient sous le poids des armes.

Les deux princes, fils de roi, s’élancèrent du centre de leurs armées comme des éléphants furieux ; Thalhend et Gau élevèrent la voix et crièrent :

Écarts-toi du courant d’air que fait naître mon javelot ; ne t’avance pas à combattre ton frère, mets-toi en garde contre le mal que je pourrais faire à la vie. »

C’est ainsi qu’ils se dirent l’un à l’autre.

Le monde entier n’était qu’une mer de sang.

Tous les héros qui frappaient de l’épée se mirent à tourner autour du champ de bataille et les coups que frappaient les deux princes, avides de combats, firent couler dans le ruisseau des torrents de sang et de 3o

3& cervelle ; ct la lutte continua ainsi, dépassant toute mesure, jusqu’à ce que le soleil eût quitté la voûte du ciel.

On entendit sur la plaine la voix de Gau, qui s’écria :

Ô combattants et jeunes héros !

Si quelqu’un nous demande grâce, ne vous vengez pas sur lui de vous avoir combattus, pour que mon frère recule devant la lutte et ne la continue pas quand il se a verra seul. »

Beaucoup d’hommes demandèrent grâce aux héros, beaucoup d’autres furent tués dans la mêlée ; toute l’armée de Thalhend se dispersa ; c’était un troupeau sans pâtre et un pâtre sans troupeau.

Thalhend resta seul, assis sur son éléphant et Gau lui adressa à haute voix beaucoup de paroles, disant :

Ô mon frère, rends-toi dans ton palais, aie soin de ta maison et de tu cour ; probablement tu n’y trouveras pas beaucoup de survivants de cette foule d’hommes d’épée illustres.

Sache que tout ce qui est bien vient de Dieu et rends-lui grâce, aussi longtemps que tu vivras, d’être sorti vivant de ce champ de bataille ; mais ce n’est pas le moment de te consulter et de tarder. »

Thalhend écouta ces paroles, il se tordit de honte et son visage fut inondé de larmes.

Il quitta le champ de bataille et se rendit àiMargh, où ses troupes se rassemblèrent de tous les côtés.

Il ouvrit la porte de ses trésors, paya la solde, équipa l’armée, lui donna toute satisfaction et para comme il fallait tous ceux qu’il vit dignes d’une robe d’honneur.

Ayant ainsi remis en état ses troupes avec de l’argent et délivré le cœur des braves de leurs soucis, il envoya un message à Gau, disant :

Ô toi qui es sur le trône ce qu’une mauvaise herbe est dans un potager, tu vas être subitement consumé par le feu ; ton âme sera percée, tes yeux seront cousus.

Tu crois que je ne puis plus te nuire, mais n’entoure pas ton cœur d’une ceinture d’illusions. »

Lorsque Gau reçut ce message brutal, il écarta de son esprit toute tendresse pour son frère ; son cœur était chagrin de ces paroles et il dit à son précepteur :

Vois donc cette énormité la Le précepteur répondit :

Ô roi !

Tu es l’héritier du trône de ton père, tu es le plus savant de ceux qui étudient, tu es le plus puissant de ceux qui portent une couronne.

Il est certain pour moi, d’après la rotation du soleil et de la lune et je te l’ai déjà dit, que ton frère illustre n’aura de repos et ne cessera de combattre jusqu’à ce qu’il se fasse tuer et se roule dans la poussière sombre, comme un serpent.

Quant à toi, ton art dans cette lutte doit être de ne rien précipiter.

Ne lui donne pas une réponse dure ; approche-toi de lui avec des offres de traités et courtoisement.

Tous ses efforts le rapprochent de sa perte ; que peux-tu y faire ?

C’est la volonté de Dieu.

S’il désire le combat ; refusons-le, car il veut se hâter et nous voulons tarder. »

Le prince fit appeler le messager et lui parla lesgnement et doucement, disant :

Va et dis à mon frère : Ne sois pas si rude et si colère.

La rudesse ne sied pas aux princes.

Or ton père était un homme illustre et tu portes un grand nom.

Je vois clairement que tu rejettes mes conseils et que tu repousses mon alliance et pourtant je ne désire qu’une chose, c’est que tu sois grand et mon ami.

Je vais dire tout ce qui est dans mon cœur et vers quoi mon âme incline.

Un mauvais conseiller a détourné ta tête de la voie facile et du chemin de la raison.

Ne prononce, ô mon frère, que des paroles justes, car ce monde n’est qu’illusion et vent.

Décide-toi pour la paix ; alors je t’enverrai tout ce qui existe de trésors et d’hommes qui te sont dévoués et ton esprit malveillant verra que mon âme n’est remplie que de justice.

Puisse ton cœur ne pas rejeter cette ouverture !

Mon intention est telle que je te le fais dire, si tu veux m’écouter dans ton obstination.

Mais si tu es déterminé à livrer bataille, si tu n’inclines pas vers l’amitié et une alliance, alors je préparerai mon armée pour le combat, car il faut à mes troupes un grand espace.

Nous nous avancerons de ce pays cultivé, nous conduirons toutes nos troupes sur le bord de la mer, nous creuserons un fossé autour du camp et fermerons la route à ces hommes avides de combat ; nous jetterons l’eau de la mer dans le fossé et fermerons rapidement les issues de l’eau, pour que ceux qui seront battus ce ne puissent pas s’échapper au-delà du fossé.

Mais ceux de nous qui seront vainqueurs dans la bataille et ne verseront pas du sang dans ce lieu resserré ; ils amèneront toute l’armée prisonnière, mais à Dieu et ne plaise qu’ils emploient les épées et les flèches !

Le messager partit, courant comme le vent et répéta à Thalhend toutes les paroles de son frère.

Thalhend écouta le message de Gau, ordonna à tous les chefs de son armée de se réunir chez lui, les fit asseoir chacun à la place qui convenait à son rang, leur communiqua la réponse de Gau et dévoila devant eux tout le secret ; puis il parla à ses hommes de guerre de la nouvelle bataille que Gau voulait livrer au bord de l’eau, disant :

Qu’en pensez-vous et que faut-il faire pour répondre à son idée ?

Si vous faites cause commune avec moi, aucun de nous ne refusera ce combat.

Si Gau veut se mesurer avec nous, qu’importe la mer ou la montagne, pourvu que les armées puissent se battre en masse !

Si vous voulez m’assister dans ce combat, le léopard ne s’effrayera pas des cris du renard.

Ceux de vous qui cherchent à acquérir de la gloire trouvèrent dans la possession du monde l’accomplissement de leurs plus grands désirs ; et si l’homme ambitieux tombe glorieusement, cela vaut mieux que s’il vivait, un objet de triomphe pour ses ennemis.

Maintenant est arrivé le grand jour où l’on verra sur le champ de bataille qui est loup et qui est brebis.

Ceux de vous qui montreront de l’ardeur dans le combat agiront en même temps dans leur intérêt, car vous recevrez de moi beaucoup de richesses, des esclaves et des chevaux parés ; on nous rendra hommage dans tous les pays, depuis le Kachmir jusqu’à la mer de Chine et je donnerai toutes ces villes à mon armée, quand je serai le maître et aurai la couronne et le trône. »

Tous les grands qui se tenaient devant lui posèrent leur front sur la terre, disant :

Nous sommes ambitieux de renom, tu es notre roi et tu vas voir la rotation du sort. »

Dernière mise à jour : 28 déc. 2021