Keï Khosrou

Keï Khosrou se rend dans la montagne et disparait dans la neige

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Il ordonna à Lohrasp de s’en retourner et ajouta :

Mes jours sont passés.

Toi, va, occupe le trône de la royauté en respectant les coutumes ; ne sème dans le monde que la semence du bien.

Quand tu seras exempt de soucis, ne te laisse pas enorgueillir par le trône et par les trésors.

Rappelle-toi que tu ne tarderas pas à partir, que la route qui te conduit auprès de Dieu est difficile à percevoir.

Cherche toujours la justice et exerce la toujours ; honore ceux qui sont les meilleurs dans le monde. »

Lohrasp descendit de cheval à l’instant, baisa la terre et resta absorbé par la douleur.

Le roi lui dit adieu, ajoutant :

Sois la trame et la chaîne de la justice. »

Quelques chefs de l’armée, des grands pleins de vigilance et des héros partirent avec Khosrou : c’étaient le Destan, Rustem, Gouderz, Guiv, ensuite Bijen le vaillant et le courageux Gustehem ; le septième était Feribourz fils de Kaous ; enfin le huitième’, l’illustre Thous.

Leur cortège se mit en route par troupes et le roi monta de la plaine jusque sur la crête d’une montagne.

Là ils restèrent une semaine à se reposer et à mouiller leurs lèvres desséchées, en se lamentant et en se désespérant de ce que faisait le roi ; personne ne devinait comment cette affaire douloureuse se passerait et chaque Mobed disait en secret que jamais personne n’avait raconté une chose pareille dans le monde.

Lorsque le soleil leva sa tête au-dessus de la montagne, il s’assembla une foule de tous les côtés du monde ; cent mille Iraniens, hommes et femmes, vinrent entourer le roi avec des cris et des lamentations qui remplissaient la montagne et ébranlaient les rochers ; ils s’écrièrent tous :

Ô roi !

Que s’est-il passé, que ton esprit serein se soit rempli de douleur et de tristesse ?

Si tu as à te plaindre de ton armée, si tu es arrivé à mépriser ce trône, dis-nous-en la raison et ne quitte pas le pays d’Iran, ne donne pas un nouveau maître à ce vieux monde.

Nous tous serons la poussière sous les pieds de ton cheval ; nous sommes les adorateurs de ton ange gardien Aderguschasp.

Qu’as-tu fait de ton savoir, de ton intelligence et de ta sagesse, toi qui a vu le Serosch, qui n’était pas apparu, même à Feridoun ?

Nous prierons tous Dieu, nous ferons tous nos adorations dans le temple du feu, espérant que Dieu, le très-saint, aura pitié de nous et qu’il éclairera ton cœur de Mobed en notre faveur. »

Le roi des rois, confondu, appela les plus puissants parmi ceux qui se trouvaient dans cette foule et leur dit :

Tout va bien ici et il ne faut pas pleurer sur ce qui va bien.

Soyez reconnaissants envers Dieu ; soyez pieux et apprenez à connaître le Créateur.

Nous serons bientôt réunis de nouveau, ne vous affligez donc pas de mon départ. »

Ensuite, il dit aux grands qui l’avaient accompagné :

Retournez-vous-en de cette montagne sans le roi.

Le chemin qui est devant moi est long ; on n’y trouve ni eau, ni herbes, ni feuilles d’arbres.

Épargnez-vous la route et le retour ; dirigez vos esprits vers la lumière de Dieu.

Personne ne peut traverser ces sables à moins d’être doué de beaucoup de force et de puissance. »

Trois parmi les héros qui portaient haut la tête, le Destan, Rustem et le vieux Gouderz, qui était plein d’ambition et de sagacité et n’oubliait rien, écoutèrent le roi et partirent.

Mais Thous, Guiv, Feribourz, Bijen et le vaillant Gustehem ne voulurent pas le quitter ; ils continuèrent à marcher avec lui pendant un jour et une nuit, mais le désert et la sécheresse les épuisaient.

Ou aperçut alors sur la route une source d’eau et Khosrou, le maître du monde, s’y rendit.

Ils s’arrêtèrent auprès de cette eau limpide, ils en burent et se reposèrent.

Le roi dit à ces gardiens des frontières de l’Iran :

Aujourd’hui nous ne dépasserons pas ce lieu.

Nous parlerons beaucoup du passé, car vous ne me verrez plus longtemps.

Quand le soleil aura levé son drapeau brillant et couvert d’or liquide le sombre surface de la terre, alors le moment où je dois vous quitter sera venu et j’espère être en compagnie avec le Serosch.

Si mon ce cœur se révoltait contre ma résolution, j’arracherais de mon corps ce cœur troublé.

Quand une partie de la nuit noire se fut écoulée, le roi illustre se prosterna devant Dieu ; il lava sa tête et son corps dans l’eau limpide de la source et récita par devers lui le Zendavesta.

Ensuite, il dit aux grands pleins de prudence :

Je vous fais des adieux éternels.

Le soleil va montrer ses rayons et dès ce moment vous ne me verrez plus qu’en rêve.

Ne restez pas demain dans ce désert de sable ; quand même il pleuvrait du musc ; car il viendra de la montagne un grand orage qui arrachera les branches et les feuilles des arbres et il tombera du ciel sombre une neige telle que vous ne retrouveriez pas la route de l’Iran.

Dernière mise à jour : 7 sept. 2021