Keï Khosrou

Commencement du récit [^1]

...

Quand un cyprès, dans un jardin, pousse un rejeton dont la cime verte s’élève au-dessus du toit du palais, l’arbre se réjouit de la hauteur où il le voit atteindre ; ainsi un père qui voit son rejeton prudent et heureux est content du sort de son enfant, dont les œuvres feront le bonheur du monde.

Il faut que tu réfléchisses sur trois choses, qui sont au-dessus de toutes les autres ; ce sont les vertus acquises, la naissance et un naturel généreux et ces trois qualités sont étroitement liées.

Comment pourrait-il y avoir des vertus là où il n’y aurait pas de naturel généreux ?

Et as-tu jamais vu un homme de noble naissance qui ne fût vertueux ?

Le naturel est ce que donne la grâce de Dieu ; il fait qu’on s’abstient du mal et qu’on refuse d’y prêter l’oreille.

La naissance est ce que donne la race du père et un tronc pur produit naturellement un fruit pur.

Les vertus sont ce que tu acquiers dans le commerce des hommes ; elles te coûtent des efforts et te font souvent plier sous le poids de la fatigue.

Ces trois choses constituent l’homme noble, qui seul est digne des grâces de Dieu.

Quand tu les possèdes toutes les trois, il te faut encore du sens, il faut que tu connaisses le bien et le mal ; et quand ces quatre qualités sont réunies dans un homme, il peut braver toute douleur, toute fatigue et tout souci, excepté la mort ; car il n’y a pas de remède contre elle et elle est le plus poignant des maux.

Or Keï Khosrou possédait ces quatre qualités et c’est le sort qui l’avait ainsi formé et envoyé sur la terre.

[^1] : C'est Firdousi lui-même qui parle ici.

Dernière mise à jour : 7 sept. 2021