Keï Khosrou

Bijen demande à Guiv la permission de livrer bataille

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Les deux armées, composées de guerriers illustres et avides de combat, restèrent ainsi immobiles en face l’une de l’autre pendant trois jours et trois nuits ; tu aurais dit que pas un homme ne remuait les lèvres.

Gouderz dit :

Si je quitte ma position, si je m’avance contre les Touraniens, un corps d’armée fondra sur mes derrières et il ne me restera dans la main que du vent. »

Jour et nuit il se tenait sur le front de l’armée, cherchant à tirer un bon augure du soleil et de la lune ; cherchant quel était le jour heureux, quel était le moment d’agir, quand se lè- verait l’orage du jour de la bataille qui devait aveugler par la poussière les yeux des combattants et se disant :

Puissé-je avoir le dessus et lancer mon armée sur les Touraniens comme un ouragan ! »

Piran, de son côté, attendait le moment où Gouderz bouillonnant enfin de colère s’avancerait sans assurer ses derrières, de sorte que la troupe placée en embuscade trouvât un chemin pour le prendre à des.

Le quatrième jour Bijen se rendit de l’arrière-garde au centre de l’armée et se présenta devant son père les vêtements déchirés et lançant de la poussière vers le ciel : il dit :

Ô mon père qui es plein d’expérience, comment peux-tu si follement rester inactif ?

Voici le cinquième jour qui arrive depuis que rien ne se fait ni de jour ni de nuit.

Le soleil n’a pas encore vu les épées des héros, la poussière n’a pas encore tourbillonné dans les airs ; les cavaliers sont couverts de leurs cuirasses, mais on ne dirait pas que c’est du sang qui coule dans leurs veines.

Après le glorieux Rustem, il n’y avait pas dans l’Iran un cavalier comme Gouderz ; mais depuis qu’il est revenu du combat de Peschen, de ce carnage et de cet immense champ de bataille, ou il a vu tomber un si grand nombre de ses fils et périr la fortune des Iraniens, son cœur est brisé, il a perdu sa voie et il ne veut plus voir de combat.

Il faut prendre en considération sa vieillesse ; il n’a plus d’yeux que pour la voûte du ciel ; et il s’occupe, lui qui commande une armée innombrable, à compter les étoiles qui entourent la lune.

Sois convaincu qu’il n’a plus de sang dans le corps, qu’il est trop faible pour le combat des braves.

Cc n’est pas le vieux Gouderz qui m’étonne, Gouderz dont la pensée n’est plus à son pays ; mais c’est toi,

ô mon père, toi de qui les lions empruntent la bravoure.

Deux armées ont les yeux sur toi ; montre donc de l’ardeur, allume ta colère.

Dans ce moment ou la terre ést chaude et l’air serein, l’armée ne reçoit pas l’ordre de combattre ; mais lorsque la bonne saison sera passée, que la terre sera gelée et dure comme l’acier, quand les mains seront glacées .

sur les lances, quand nous aurons derrière nous la neige et devant nous l’ennemi, qui d’entre les héros donnera alors l’exemple à l’armée et ira combattre sur ce champ de bataille ?

Si tu crains une embuscade, donne-moi mille vaillants cavaliers, mille hommes de guerre que je choisirai parmi les plus braves ; et nous réduirons au néant leur embuscade, nous lancerons leurs têtes jusqu’au delà de la lune. »

Guiv sourit aux paroles de Bljen et combla de bénédictions son héroïque enfant ; il s’adresse à Dieu le distributeur de la justice, disant :

Je te rends grâce de m’avoir donné un fils qui sait ce qui est bien ; de l’avoir doué de force, de nobles sentiments et de piété ; de l’avoir rendu sage en toute chose et ardent pour le combat et de m’avoir ramené ce vaillant jeune homme, tel que doit être le fils d’un Pehlewan.

Un lion a dit à sa compagne :

Si notre fils n’est pas courageux, nous lui retirerons notre tendresse, nous romprons tous les liens qui nous unissent à lui ; et que l’eau de la mer lui in.

1 serve de père et la poussière de mère !

Mais toi, ô mon fils, ne parle pas follement de ton grand-père, car il a beaucoup d’expérience ; il est plus sage que nous et il commande à cette armée glorieuse.

Un homme qui a manié les affaires du monde n’a pas besoin qu’on lui donne des avis en toute circonstance.

Si nos cavaliers souffrent du poids de leur armure, les Turcs de leur côté ne vivent pas dans les délices ; ils sont malheureux, ils perdent la tête ; leurs yeux sont remplis de larmes et leurs cœurs de sang.

Le vieux et rusé Gouderz veut forcer les Turcs à s’avancer pour livrer bataille ; et aussitôt que leurs derrières seront loin de la montagne, il lancera contre eux toute son armée avide de combat : alors-tu verras comment la massue de Gouderz : balayera toute cette frontière.

Enfin Gouderz observe la rotation du ciel pour découvrir notre bonne et notre mauvaise étoile ; et lorsque le jour pmpice sera arrivé, il délivrera la terre de nos ennemis." Bijen répondit à son illustre père :

Ô Pehlewan du monde !

Si mon grand-père que bénisse le ciel n’y veut pas consentir, nous ne mettrons pas de cottes de mailles de Roum ; je m’en irai ôter ma cuirasse et mon casque, je boirai du vin jusqu’à donner à mes joues pâles des couleurs vermeilles ; et quand le Pehlewan du monde aura besoin de moi, je partirai ceint pour le combat. »

Dernière mise à jour : 7 sept. 2021