Keï Khosrou

Bahram fait prisonnier Keboudeh

...

Lorsque l’armée fut réunie autour du Sipehbed et qu’elle se trouva sur la route de Guirauguird, après avoir traversé le feu, elle se mit en marche en bon ordre, couvrant de ses tentes les plaines et les ravins, prenant toutes les précautions nécessaires et envoyant de tous cotés des éclaireurs.

Guirauguird était la résidence de Tejaou, un cavalier qui ne craignait pas un lion.

Il possédait des troupeaux de chevaux qui erraient sur toute la plaine d’une montagne à l’autre.

En apprenant qu’une armée d’Iraniens s’approchait et qu’il fallait éloigner les troupeaux de leur route, il envoya en toute hâte auprès des pâtres d’Afrasiab un brave dont le nom était Keboudeh ;

C’était un homme habile et on avait besoin d’habileté dans cette occasion.

Tejaou lui dit :

Aussitôt que le ciel sera couvert de ténèbres, tu partiras d’ici sans que personne te voie, tu observeras le nombre des Iraniens et quels sont les chefs qui portent des drapeaux et des diadèmes.

Car je voudrais les surprendre pendant la nuit ;

Je voudrais, dans la bataille, convertir en plaine toute la montagne.

Keboudeh partit, semblable à un Div noir et s’approcha, à la faveur de la nuit, de l’armée des Iraniens.

Or cette nuit la ronde du camp se faisait par Bahram, dont le lacet aurait pu servir à prendre des éléphants.

Le cheval de Keboudeh se mit à hennir et Bahram qui se trouvait dans le camp prêta l’oreille ;

Il banda son arc, se raffermit sur ses étriers et lança son destrier, qui ressemblait à un lourd dromadaire.

Il décocha une flèche sans prononcer une parole et quoiqu’il ne pût voir Keboudeh, à cause des ténèbres, le frappa à la ceinture.

Le pâtre du roi devint noir d’effroi ; il descendit de cheval et demanda grâce.

Bahram lui dit :

Parle-moi véritablement et dis-moi qui t’a envoyé ici et quel est celui de ces braves que tu voulais attaquer.

Keboudeh répondit :

Si tu veux m’accorder la vie, je te dirai tout ce que tu demandes.

Tejaou est mon maître et c’est lui qui m’a envoyé, car je suis un des serviteurs qui l’entourent.

Ne me tue pas, afin que je puisse te montrer le lieu où il se retire pour se reposer.

Mais Bahram lui dit :

Tejaou est pour moi ce que serait pour un lion féroce une vache qui l’attaquerait.

Il trancha la tête de Keboudeh avec son poignard et la suspendit à la corde de sa selle royale, la porta au camp et l’y jeta avec mépris ; car ce n’était ni la tête d’un homme illustre, ni celle d’un brave cavalier.

Le coq et l’alouette se firent entendre sans que Keboudeh fût revenu auprès de Tejaou ;

Et ce prince avide de combats en fut affligé, car il conclut qu’il lui était arrivé malheur.

Il rassembla les troupes qu’il avait auprès de lui et se mit sur-le-champ en route avec elles.

Dernière mise à jour : 7 sept. 2021