Feridoun

Feridoun envoie Minoutchehr pour combattre Tour et Selm

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Feridoun reçut sur-le-champ la nouvelle qu’une armée avait passé le Djihoun et ordonna que Minoutchehr s’avançât avec son armée de la frontière dans le désert.

Le vieux roi lui fit une allocution en ces termes :

Quand un jeune homme est destiné à une haute fortune, le mouton sauvage que suit le tigre et devant lequel se tient le chasseur, tombe inopinément dans ses pièges ; et avec de la patience, avec de la prudence, de la ruse et de l’intelligence, il amène le lion terrible dans ses filets.

D’ailleurs, si les méchants se remuaient vers la fin du jour, je me hâterais de punir, je ferais briller un fer rouge.

Minoutchehr lui répondit :

Ô roi, qui portes haut la tête, si quelqu’un s’avance près de toi pour assouvir sa haine, c’est que la fortune nourrit contre lui de mauvais desseins et qu’il est destiné à briser l’alliance qui unit son âme et son corps.

Je vais me couvrir d’une cotte de mailles de Roum, de manière à ne pas laisser découverte une jointure.

En cherchant vengeance, je détruirai leur armée sur le champ de bataille.

Je ne reconnais pour brave aucun d’eux ; comment oseront-ils me combattre ?

Puis, il ordonna que Karen, avide de combats, s’avançât de la frontière dans le désert.

Il déploya la tente royale, il fit flotter l’étendard impérial dans la plaine.

Les corps de l’armée s’avancèrent l’un après l’autre, les plaines et les montagnes bouillonnèrent comme la mer.

Le jour brillant fut obscurci par la poussière, de sorte que tu aurais dit que le soleil était devenu noir.

Un bruit s’élevait de l’armée qui assourdissait les hommes aux oreilles perçantes ; les hennissements des chevaux arabes dans la campagne l’emportaient sur le bruit des tambours.

Deux rangs d’éléphants s’étendaient du camp du Pehlewan à une distance de deux milles ; soixante de ces éléphants portaient sur leur dos des trônes d’or incrustés de pierreries de toute espèce, trois cents portaient les bagages, trois cents étaient prêts pour le combat, tous cachés sous leurs armures ; il n’y avait que leurs yeux qui n’étaient pas couverts de fer.

On fit avancer les tentes du roi ; l’armée marcha de Temmischeh vers le désert, sous les ordres de Karen le vengeur.

Elle se composait de trois cent mille cavaliers, tous hommes de renom, tous armés de cuirasses ; ils partirent avec leurs lourdes massues, pleins de courage, semblables à des lions sauvages et prêts à venger Iredj.

Ils suivaient le drapeau de Kaweh, leurs épées bleues dans les mains.

Minoutchehr, avec Karen au corps d’éléphant, sortit de la forêt de Narwen, vint longer le front de son armée et la rangea sur la large plaine.

Il donna la gauche à Guerschasp, la droite à Sam le héros et à Kobad.

Les deux armées se mirent en ligne ; Minoutchehr occupait le centre avec Serv, il brillait au milieu de la foule comme la lune, ou comme le soleil lumineux qui se lève au-dessus des montagnes.

Les chefs des troupes comme Karen et les héros comme Sam, avaient tiré les épées des fourreaux ; des hommes comme Kobad commandaient l’avant-garde et le héros issu de la race de Teliman, les embuscades.

Toute l’armée avec ses lions de combat et avec le bruit des timbales, était ornée comme une fiancée.

On apprit à Selm et à Tour que les Iraniens se préparaient pour le combat, qu’ils avaient fait sortir leurs lignes de la forêt dans la plaine, que leur bouche écumait du sang de leur cœur.

Les deux assassins s’avancèrent avec une armée nombreuse, la tête pleine de vengeance.

Ils menèrent leurs troupes sur le champ de bataille, ayant derrière eux le pays des Alains et la mer.

Kobad s’avança pour reconnaître l’ennemi et Tour, lorsqu’il le sut, vint à lui, rapide comme le vent, disant :

Retourne auprès de Minoutchehr et dis-lui :

Ô jeune roi sans père, puisque c’est une fille qui est née de la race d’Iredj, comment pourraient t’appartenir le trône et le sceau et la couronne ?

Il lui répondit :

Oui, je porterai ton message, tel que tu me l’as dit et avec le nom que tu as donné à Minoutchehr.

Mais quand tu y auras réfléchi, quand ta tête aura consulté en secret ton cœur, tu reconnaîtras que c’est une chose immense et tu trembleras de tes paroles irréfléchies.

Quand les bêtes féroces pleureraient sur votre sort jour et nuit, il n’y aurait rien de surprenant, car depuis la forêt de Narwen jusqu’à la frontière de Chine, tout est rempli de cavaliers prêts pour le combat et d’hommes demandant vengeance ; et quand vous verrez briller autour de l’étendard de Kaweh nos épées d’acier, votre cœur et votre tête trembleront de peur et vous ne distinguerez plus les monts des vallées.

Kobad alla pour parler au roi et lui répéta ce qu’il avait entendu de la bouche de ce brave.

Minoutchehr sourit en disant :

Il n’y a qu’un insensé qui puisse tenir de tels discours.

Que la gloire soit au maître des deux mondes, qui connaît ce qui est manifeste et ce qui est caché.

Il sait que je suis le petit-fils d’Iredj ; Feridoun l’illustre est mon garant.

Maintenant que nous allons commencer le combat, je prouverai ma naissance et mon origine ; je jure par la puissance de Dieu, créateur du soleil et de la lune, que je ferai Voir à Tour ce que je peux, de sorte que ses paupières se fermeront l’une sur l’autre et que je montrerai à l’armée sa tête séparée du tronc ; je vengerai sur lui mon père glorieux, je renverserai de fond en comble son empire.

Il ordonna qu’on apprêtât les tables et qu’on choisit une salle pour la musique et le vin.

Dernière mise à jour : 7 sept. 2021