Dara

Iskender se rend auprès de Dara comme son propre ambassadeur

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Aussitôt qu’Iskender apprit l’arrivée de cette armée, il marcha à sa rencontre.

Il resta entre les deux camps un espace de deux farsangs et Iskender convoqua ses grands, qui firent des discours de toute espèce en parlant des affaires de Dara.

Lorsqu’il fut fatigué des paroles de ses conseillers, il dit :

Il n’y a qu’une chose à faire : il faut que j’aille auprès de lui comme ambassadeur et alors je pénétrerai tous ses secrets. »

Il se fit donner une ceinture couverte de joyaux dignes d’un roi, une robe royale toute brodée, un beau destrier avec une bride d’or et une épée à fourreau d’or pendue à la selle.

Il choisit comme escorte dix Roumis qui savaient parler et comprendre ce qui se disait et sortit de son camp à l’aube du jour, accompagné de ces dix interprètes illustres.

Arrivé près de Dara, il mit pied à terre et lui rendit ses hommages.

Le maître du monde le fit approcher, lui adressa des questions et le fit asseoir près de son trône.

Tous les grands étaient confondus d’admiration et le bénirent en secret, à cause de sa beauté, de sa mine majestueuse, de sa prudence, de sa taille, de la force de ses membres et de son éclat.

Il s’assit un instant, puis se leva et s’acquitte en bons termes du message d’Iskender.

Il commença par invoquer les grâces de Dieu sur le roi, disant :

Puisse cette tête couronnée vivre à jamais !

Voici ce que dit Iskender :

Ô glorieux roi, qui fais ta volonté dans chaque lieu du monde !

Je n’ai aucun désir de combattre le roi ni de rester longtempsdans le pays d’Iran.

Mon désir est de parcourir un peu la terre et de voir pour une fois le monde.

Mes intentions’sont toutes droites et bonnes, d’au-

w tant plus que c’est toi qui es le roi d’Iran.

Mais si tu me refuses !

Le passage sur la terre, réfléchis que n je ne puis me promener dans l’air comme un nuage.

Tu t’es avancé ainsi contre moi avec une armée, sans connaître mes intentions ni rien dejce qui me regarde.

Si tu me fais la guerre, je te combattrai et ne sortirai pas de ce pays sans coup férir.

Choisis un jour pour la bataille, ne manque pas au rendez-vous et n’abandonne pas ta résolution, car je ne reculerai pas devant la lutte avec un prince, si nombreuse que son armée puisse être. »

A Dara observa le courage et la sagesse, l’éloquence, la dignité et la stature de l’envoyé ; on aurait dit que cet homme était Dara lui-même, sur son trône d’ébène, dans toute sa majesté, avec ses bracelets, son collier et sa couronne.

Il lui répondit ne Quel est ton renom et quelle est la naissance ?

Cardans la mine et sur ton front tu portes les marques des Keïanides ; tu parais être plus grand qu’un sujet et je 6

: et crois que tu es Iskender.

Évidemment le ciel t’a préparé pour une couronne en te donnant cette mine, cette stature, cette parole et ces traits. »

L’envoyé répondit :

Jamais pareille chose ne. s’est faite, ni en temps de paix ni en temps de guerre.

Il ne manque pas, à la cour d’Iskender, d’hommes qui sachent parler et qui sont la couronne sur le front des sages du monde.

Comment se ferait-il son propre messager, lui, un si grand roi, le chef d’un peuple ?

Iskender est un homme trop sage pour s’écarter des règles de ses ancêtres.

C’est selon leurs usages que mon maître m’a chargé d’un message et je l’ai répété au roi tel que je l’ai reçu. »

On apprêta alors une demeure digne du rang de l’envoyé.

Lorsque la table fut servie, le roi d’Iran ordonna au chambellan de l’appeler.

On appela à l’instant l’envoyé et on le fit asseoirà la place des ambassadeurs.

Quand le dîner fut terminé, on arrangea une assemblée, on fit venir du vin, de la musique et des chanteurs.

Iskender, lorsqu’il eut bu du vin bon pour la santé, plaça subitement la coupe dans son sein et beaucoup de vin et de coupes ayant circulé, l’accumulation des coupes devint à la fin démesurée.

L’échanson s’approcha de Dara et lui dit :

Votre hôte d’aujourd’hui ne se sépare pas de ses coupes,»

Et le roi ordonna qu’on lui demandât pourquoi il prenait ainsi soin des coupes de vin.

L’échanson dit à Iskender :

Ô homme à la mine royale, pourquoi places-Btu lesAcoupBes d’Aor sou.s to5n 6 aisselle ? »

Iskender répondit :

C’est que les coupes reviennent aux ambassadeurs, ô homme à la bonne renommée !

Au reste, si la coutume est autre dans l’Iran, rapporte les coupes dans le trésor du roi. »

Dara rit de cette coutume et fit placer dans la main de l’envoyé une coupe remplie de joyaux dignes d’un roi et couronnée par un grenat. ’ Dans ce moment les hommes qui étaient partis de l’Iran pour demander le tribut de Roum vinrent du palais dans le lieu du banquet et se rendirent respectueusement auprès du roi.

Leur chef aperçut les traits d’Iskender, s’approcha du roi, se prosterna devant lui et lui dit :

Ce personnage est Iskender, le même qui s’asseoit sur son trône avec la massue et le diadème.

Lorsque le roi nous a ordonné de lui demander le tribut qu’il devait, il s’est mis en colère, nous a traités indignement et a parlé de faire laguerre au roi.

Je me suis sauvé de son royaume en courant à cheval dans la nuit sombre.

Nous n’avons pas vu d’homme comme lui dans le Roum ; il a envahi bravement ce pays et vient épier l’état de ton armée, de ton trésor, de ton trône et de tu couronne. »

Le roi, ayant entendu ces paroles de son messager, observa Iskender encore plus attentivement.

Mais celui-ci avait compris ce qu’on disait secrètement au maître du monde ; il attendit jusqu’à ce que li.

Le jourieût baissé et que le soleil qui éclaire le monde fût descendu vers le couchant ; alors il se rendit sous la grande porte de l’enceinte des tentes du roi, monta à cheval plein de courage et dit à ses cavaliers, à ces hommes illustres dont la bonne étoile était puissante :

w Notre vie dépend maintenant de nos chevaux : s’ils se fatiguent, nous sommes perdus. »

Ils lancèrent leurs montures aux pieds de vent et s’enfuirent du camp du maître de la terre.

Lorsque Dara ne vit plus la tête et le diadème d’Iskender, qui, dans l’obscurité, avait disparu de ses yeux, il envoya à l’instant des gardes dans la tente de son ennemi ; mais, à leur arrivée, le prudent prince était parti, car sa fortune ne dormait pas comme celle du roi.

Dura envoya des cavaliers après lui, mille braves pleins d’ardeur pour le combat ; ils s’élancèrent comme le vent, mais ils ne reconnurent pas sa trace dans cette nuit obscure.

Ils rencontrèrent une ronde mamie et s’en retournèrent sans avoir gagné autre chose que la fatigue d’une longue course.

Lorsque Iskender fut de retour dans sa tente, les héros roumis s’y rassemblèrent.

Ils trouvèrent, au ’ milieu de la nuit, leur roi plein de satisfaction, et, devant lui, une coupe remplie de joyaux.

Il dit aux héros :

Soyez heureux, réjouissez-vous de cette grâce du sort.

Cette coupe est une conquête faite au péril de ma vie ; les étoiles obéissent à mes ordres.

J’ai compté le nombre de ses troupes : il est beau--coup au-dessous de ce que nous avons entendu dire.

Tirez tous vos épées pour le combat et avancez sur cette plaine.

Nos corps se fatigueront dans la bataille, mais cette fatigue nous donnera le royaume et ses trésors.

Le Créateur du monde est mon soutien et je tiens dans mes bras la fortune. »

Les grands lui rendirent hommage, s’écriant :

Puisse la terre être heureuse sous le Kaïsar !

Nous t’oll’rons le sacrifice de nos corps et de nos âmes ; tel est notre engagement éternel envers toi.

Qui, parmi les rois, oserait se dire ton égal en bravoure, en stature et en majesté ? »

Dernière mise à jour : 7 sept. 2021